5e dimanche de Carême

Première lecture

Lecture du livre de Jérémie (XXXI 31-34) [1]

Voici venir des jours, déclare le Seigneur, où je conclurai avec la maison d'Israël et avec la maison de Juda une alliance nouvelle. Ce ne sera pas comme l'alliance que j'ai conclue avec leurs pères, le jour où je les ai pris par la main pour les faire sortir d'Egypte : mon alliance, c'est eux qui l'ont rompue, alors que moi, j'avais des droits sur eux[2]. Mais voici quelle sera l'alliance que je conclurai avec la maison d'Israêl quand ces jours-là seront passés, déclare le Seigneur. Je mettrai ma Loi au plus profond d'eux-mêmes ; je l'inscrirai dans leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. Ils n'auront plus besoin d'instruire chacun son compagnon, ni chacun son frère en disant : « Apprends à connaître le Seigneur ! » Car tous me connaîtront, des plus petits jusqu'aux plus grands, déclare le Seigneur. Je pardonnerai leurs fautes, je ne me rappellerai plus leurs péchés.


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Cet oracle de Jérémie est l'un des textes de l'Ancien testament qui a exercé la plus grosse influence. Il est inséré dans un ensemble appelé le « livret de la consolation » (Jérémie, XXX-XXXI). Cet oracle s'apparente à d'autres oracles du livre de Jérémie, introduits par la formule « voici venir des jours... ». Ils ont tous pour objet une réinterprétation des traditions religieuses d'lsraël. Les infidélités du peuple, la faillite des institutions exigeaient ces réinterprétations au temps de Jérémie. L'Alliance et la loi qui en fixait les conditions concrètes (voir au troisième dimanche du Carême) n'échappaient pas à la règle. Les prophètes avaient dénoncé les ruptures d'alliance. Jérémie avait expérimenté que la loi nouvelle (le Deutéronome) qui avait servi de base à la réforme du roi Josias au début de son ministère ne parvenait pas à toucher les cœurs. Ce fut l'échec. Cet oracle a jailli des malheurs du temps et de la foi inébranlable de Jérémie en Dieu. La loi de la nouvelle alliance sera écrite sur les tablettes du cœur et l'homme pourra ainsi y adhérer de l'intérieur. Mû intérieurement par Dieu, le peuple pourra réaliser la formule de l'alliance. Mais Jérémie sait, plus que quiconque, que le cœur de l'homme est compliqué et malade. Aussi cette alliance nouvelle ne pourra-t-elle reposer que sur le pardon de Dieu, qui ne se souvient plus des péchés. Le terrain est préparé pour la révélation de Jésus Christ.

[2] Il y a des hommes charnels qui attendent de Dieu des récompenses charnelles, et qui ne servent Dieu que pour les promesses qu'il leur en a faites ; c'est à cause de ces hommes que la loi a mérité de s'entendre dire par saint Paul « qu'elle engendre pour la servitude » (épître aux Galates, IV 24). Pourquoi ? Parce qu'elle est prise par les Juifs dans son sens charnel ; car, entendue dans son sens spirituel, elle s'appelle l'Evangile. Elle engendre donc pour la servitude ; et qui engendre-t-elle ? Ceux qui servent Dieu pour les biens temporels : quand ils les possèdent, ils rendent grâce ; quand ils en sont privés, ils blasphèment. Car servir Dieu pour ces biens-là, ce n'est pas le servir d'un cœur sincère. Ils jettent, en effet, les yeux sur ceux qui ne servent pas notre Dieu et remarquent que ceux-ci ont en partage ces biens, pour lesquels eux-mêmes servent Dieu ; et ils se disent : « A quoi me sert d'être fidéle au Seigneur ? Je ne suis pas mieux partagé que ceux qui le blasphèment tous les jours. Tel prie et meurt de faim : tel blaspème et regorge de richesses. » Raisonner ainsi est bien d'un homme, et d'un homme qui est encore sous l'ancienne alliance. Mais celui qui honore Dieu selon l'esprit de la nouvelle doit espérer, non l'héritage ancien, mais le nouveau. Si donc tu espères l'héritage nouveau, dépasse la terre, foule aux pieds les cimes des montagnes, c'est-à-dire méprise la tête altière des superbes ; mais quand tu écraseras de ton mepris et fouleras aux pieds ces grandeurs terrestres, reste humble pour ne pas tomber de ta hauteur. Ecoute : en haut les cœurs ! en haut vers le Seigneur, non contre le Seigneur. Tous les orgueilleux ont le cœur en haut, mais contre le Seigneur. Si tu veux vraiment tenir ton cœur en haut, qu'il soit tourné vers le Seigneur, et si tu tiens ton cœur tourné vers le Seigneur, Lui-même tient ton cœur pour l'empècher de tomber à terre (saint Augustin : sermon XXV).