4ème dimanche de Pâques - Année C

Première lecture

Lecture du livre des Actes des Apôtres (XIII 14, 43-52)[1]

Paul et Barnabé étaient arrivés à Antioche de Pisidie[2]. Le jour du sabbat, ils entrèrent à la synagogue.

Quand l'assemblée se sépara, beaucoup de Juifs et de convertis au judaïsme les suivirent. Paul et Barnabé[3], parlant avec eux, les encourageaient à rester fidèles à la grâce de Dieu. Le sabbat suivant, presque toute la ville se rassembla pour entendre la parole du Seigneur. Quand les Juifs virent tant de monde, ils furent remplis de fureur ; ils repoussaient les affirmations de Paul avec des injures. Paul et Barnabé leur déclarèrent avec assurance : « C'est à vous d'abord qu'il fallait adresser la parole de Dieu. Puisque vous la rejetez et que vous-mêmes ne vous jugez pas dignes de la vie éternelle, eh bien ! nous nous tournons vers les païens. C'est le commandement que le Seigneur nous a donné : J'ai fait de toi la lumière des nations pour que, grâce à toi, le salut parvienne jusqu'aux extrémités de la terre ». En entendant cela, les païens étaient dans la joie et rendaient gloire à la parole du Seigneur ; tous ceux que Dieu avait préparés pour la vie éternelle devinrent croyants. Ainsi, la parole du Seigneur se répandait dans toute la région. Mais les Juifs entraînèrent les dames influentes converties au judaïsme, ainsi que les notables de la ville ; ils provoquèrent des poursuites contre Paul et Barnabé, et les expulsèrent de leur territoire. Ceux-ci secouèrent contre eux la poussière de leurs pieds[4] et se rendirent à Iconium, tandis que les disciples étaient pleins de joie dans l'Esprit Saint.


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Dieu est fidèle. Par ses promesses, il s'est engagé envers la postérité d'Abraham. Faut-il dès lors accepter dans la communauté des croyants ceux qui n'appartiennent pas à la famille d'Abraham ? Voilà une des questions majeures qui a fortement secoué les toutes premières communautés chrétiennes. A lire l’œuvre de saint Luc, tant l’évangile que les Actes des Apôtres, on perçoit combien la lutte fut âpre entre les partisans du rejet et ceux de l'accueil. Saint Luc s'est heurté à une partie des chrétiens convertis de la synagogue, qui n'entendaient pas ouvrir les portes aux païens, au nom même de la fidélité divine. Saint Luc a construit son ouvrage de façon à témoigner que Dieu, tout en restant fidèle aux promesses faites aux fils d'lsraël, veut étendre son salut à tous les hommes. Ce n'est pas par hasard si saint Luc, dans la seconde partie des Actes des Apôtres, accorde tant d'importance à saint Paul qui est à la fois un grand partisan de l'ouverture et un pur fils d’Israël. D'après ce qu'en dit saint Luc, Antioche de Pisidie représente une étape décisive dans la vie de saint Paul. Jusqu'alors saint Paul qui s'était exclusivement adressé aux gens de la synagague, se tourne avec succès vers les païens. Pour justifier son attitude, il reprend à son compte l'oracle messianique : « j'ai fait de toi la lumière des nations pour que, grâce à toi, le salut parvienne jusqu'aux extrémités de la terre » (Isaïe, XLIX 6). Mais ici c'est le Seigneur Ressuscité qui donne mission à saint Paul. Saint Luc voit donc la réalisation de l'oracle messianique en Jésus. C'est dire que dans les promesses du Dieu d’Israël, il y avait la promesse d'un Serviteur à venir qui porterait à tous le salut de Dieu. L'apôtre Paul est le témoin de Jésus auprès de tous dans la ligne des paroles prophétiques d’Isaïe.

[2] Antioche de Pisidie : à ne pas confondre avec Antioche de Syrie, Antioche de Pisidie était sous Auguste une colonie de la province de Galatie (Antiochia Cæsaræ).

[3] Barnabé était un juif de la tribu de Lévi, né dans l’île de Chypre où une importante colonie juive s’était installée à l’époque d’Alexandre le Grand. Barnabé qui avait reçu dans sa jeunesse une culture hellénique, vint à Jérusalem parfaire sa culture juive. Il fit partie de la première communauté chrétienne de Jérusalem : « Joseph, surnommé par les apôtres Barnabé - ce qui veut dire fils de consolation - lévite originaire de Chypre, possédait un champ ; il le vendit, apporta l’argent et le déposa au pied des apôtres » (Actes des Apôtres, IV 36-37). Dès lors, tout au long de ses courses apostoliques, il vécut du travail de ses mains, comme l’affirme saint Paul (première épître de saint Paul aux Corinthiens, IX 6). Certaines traditions affirment que Barnabé étudia la torah à l’école de Gamaliel, à Tarse, où il rencontra Saul qui devint saint Paul. Toujours est-il que c’est Barnabé qui présenta Paul à la communauté de Jérusalem : « Barnabé l’ayant pris avec lui, le mena aux apôtres et leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur qui lui avait parlé et avec quel courage il avait à Damas prêché le nom de Jésus » (Actes des Apôtres, IX 27). Les apôtres envoyèrent Barnabé à Antioche où il fit venir Paul. Ensuite, Paul et Barnabé furent envoyés ensemble à Chypre puis en Galatie méridionale (Pergé, Antioche de Pisidie, Iconium, Lystres, Derbé) d’où ils revinrent à Antioche. Ils furent encore ensemble au concile de Jérusalem dont, avec Jude-Barsabbas et Silas, ils portèrent les décisions à Antioche. Alors que Paul partait avec Silas pour son second voyage, Barnabé, accompagné de Jean-Marc, retournait à Chypre où, d’après les traditions il mourut martyr.

[4] « Quant à celui qui ne vous accueillerait pas et n’écouterait pas vos paroles, en sortant hors de cette maison ou de cette ville, secouez la poussière de vos pieds, en témoignage contre eux » (évangile selon saint Matthieu, X 14). « Quant à l’endroit qui ne vous accueillerait pas et ou l’on ne vous écouterait, en sortant de là, secouez la terre qui est sous vos pieds » (évangile selon saint Marc, VI 11). « Et ceux qui ne vous recevront pas, en sortant de cette ville, secouez la poussière de vos pieds, en témoignage contre eux » (évangile selon saint Luc, IX 5). « Même la poussière qui, de votre ville, s’est attachée à nos pieds, nous l’essuyons pour vous la laisser » (évangile selon saint Luc, X 11). Porter en Palestine la poussière d’une région impure, c’était la contaminer ; ainsi, au retour d’un voyage en terre païenne, tout Juif était tenu de secouer soigneusement ses chaussures et ses habits.