7e dimanche des temps ordinaires

Evangile

Suite du saint Évangile de notre Seigneur
Jésus-Christ selon Saint Luc (VI 27-38).

Jésus déclarait à la foule : « Je vous le dis, à vous qui m'écoutez : Aimez vos ennemis[1], faites du bien à ceux qui vous haïssent[2]. Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient. A celui qui te frappe sur une joue, présente l'autre. A celui qui te prend ton manteau, laisse prendre aussi ta tunique. Donne à quiconque te demande, et ne réclame pas à celui qui te vole.

Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle reconnaissance pouvez-vous attendre ? Même les pécheurs aiment ceux qui les aiment. Si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle reconnaissance pouvez-vous attendre ? Même les pécheurs en font autant. Si vous prêtez quand vous êtes sûrs qu'on vous rendra, quelle reconnaissance pouvez-vous attendre ? Même les pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu'on leur rende l'équivalent. Au contraire, aimez vos ennemis[3], faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Dieu très-haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants[4].

Soyez miséricordieux[5] comme votre Père est miséricordieux[6]. Ne jugez pas[7], et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés. Pardonnez, et vous serez pardonnés. Donnez, et vous recevrez : une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera versée dans votre tablier ; car la mesure dont vous vous servez pour les autres servira aussi pour vous. »


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Reconnaissez donc le grand service que vous rend votre ennemi : votre ami ne pouvait faire de vous un enfant de Dieu ; mais vous le deviendrez par votre ennemi si vous l'aimez : aimez dans votre ami ce qui vous charme, mais dans votre ennemi les fruits et la récompense qui vous viennent de votre amour : sa haine vous est utile : c'est l'absinthe dont vous pouvez faire du miel (saint Eucher de Lyon : « Instructionum libri duo »).


Eucher, issu d’une grande famille lyonnaise, fit de bonnes études, et fut sénateur. Marié à la « noble et pieuse Galla » dont il eut deux fils (les évêques Véran et Salone) qui furent instruits par Hilaire, futur archevêque d'Arles, moine à Lérins. Vers 422, avec le consentement de sa femme, il entra au monastère de Lérins, puis se fit ermite dans l’île Sainte-Marguerite. En 435, il fut obligé d’accepter 1'évêché de Lyon. Il mourut vers 450.

[2] Ne prétendez pas que c’est à votre ennemi de vous prévenir : c’est être insensé que de refuser l’occasion d’acquérir un mérite. Vous dites qu’il vous méprisera si vous le prévenez ? De peur d’être méprisé par l’homme, vous méprisez Dieu. Qu’il m’arrive d’être méprisé et injurié pour Dieu, plutôt que d’être honoré par les rois ! (saint Jean Chrysostome : homélie XIII sur l’évangile selon saint Matthieu, 6).

[3] Nous avons un amour réel pour nos ennemis quand nous ne nous attristons pas de leurs progrès et que nous ne nous réjouissons pas de leurs chutes ; car on ne peut pas dire que l'on aime celui qu'on ne voudrait pas voir meilleur, que l'on aime voir debout celui dont la chute réjouit. Cependant il peut arriver que sans perdre la charité, on se réjouisse de la chute de son ennemi, et que sans commettre aucune faute d'envie, on s'attriste de sa gloire : c'est quand sa chute aide au relèvement de plusieurs et que son triomphe amène l'oppression de beaucoup d'autres. Mais il faut en cela une grande réserve pour ne pas donner cours à nos haines sous l'apparence du bien d'autrui. Et quand Dieu frappe le méchant, tout en applaudissant à la justice du juge, nous devons compatir à la peine de celui qui est châtié (saint Grégoire le Grand : Moralia in Job, XXII 6 ).

[4] C’est aussi à tous, aux bons et au méchants, que le Christ par son avènement a donné le soleil et la pluie dans le sacrement du baptême et du Saint-Esprit (saint Hilaire de Poitiers : commentaire de l’évangile selon saint Matthieu, IV 27).

[5] L’exercice de la miséricorde résume toutes les vertus que le Seigneur loue dans les Béatitudes « Qui supportera les injures des faibles dans la mesure où cela est utile à leur salut ? Qui préfèrera subir l’injustice d'autrui plutôt que de rendre la pareille ? Qui aura la volonté de donner à quiconque demande, d’aimer ses ennemis, de faire du bien à ceux qui haïssent, de prier pour ceux qui calomnient ? Qui peut faire cela sinon celui qui est entièrement et parfaitement miséricordieux ? Cette seule vertu étant pratiquée, toute misère est détruite » (saint Augustin : commentaire du Sermon sur la Montagne, I 80).

[6] Quand vous aurez commencé à aimer, vous serez l'imitateur de sa bonté. Et ne soyez pas étonné que l'homme puisse ressembler à Dieu ; il le peut, Dieu le voulant ainsi. Le bonheur n’est pas de dominer son prochain, d'être riche ; ce n’est pas par là que l’homme pourrait ressembler à Dieu, ce n'est pas en cela que consiste la grandeur de Dieu. Mais celui qui prend sur lui la charge du prochain, qui donne aux indigents ce qu'il a reçu de Dieu, celui-là devient le Dieu de ceux qu il oblige, celui-là est l'imitateur de Dieu. Tout en habitant sur terre, vous contemplerez alors Dieu qui gouverne toutes choses, vous commencerez à parler les mystères de Dieu (Epître à Diognète, X)

[7] Celui dont nous avions désespéré se convertit subitement et devient excellent ; et celui dont nous attendions beaucoup, tombe et devient mauvais. Tous nos jugements sont téméraires. Nos craintes n'ont aucune certitude et nos affections non plus. Ce qu'est l'homme aujourd'hui, l'homme le sait à peine ; cependant chacun sait encore d'une certaine façon ce qu'il est aujourd'hui, mais il ne peut savoir ce qu'il sera demain (saint Augustin : sermon XLVI 27).