3e dimanche des temps ordinaires

Evangile

Suite du saint Évangile de notre Seigneur
Jésus-Christ selon Saint Luc[1] (I 1-4 & IV 14-21).

Puisque aussi bien beaucoup ont entrepris de composer un récit des évènements qui se sont accomplis parmi nous, selon ce que nous ont transmis ceux qui, témoins oculaires dès le commencement, sont devenus ensuite serviteurs de la Parole, j’ai décidé, moi aussi, après m’être informé exactement de tout depuis le début, d’en écrire pour toi l’exposé suivi, excellent[2] Théophile[3], pour que tu te rendes bien compte de la sûreté des enseignements que tu as reçus[4].

(…) Et Jésus retourna en Galilée avec la puissance de l'Esprit, et sa renommée se répandit dans toute la contrée à son sujet. Et il enseignait dans leurs synagogues, glorifié par tous[5]. Et il vint à Nazareth, où il avait été élevé, et entra selon sa coutume le jour du sabbat, dans la synagogue[6], et il se leva pour faire la lecture[7]. On lui remit le livre du prophète Isaïe, et déroulant le le livre, il trouva le passage[8] où était écrit : « L'Esprit du Seigneur est sur moi[9], parce qu’il m'a consacré par l'onction. Il m'a envoyé annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres[10], proclamer aux captifs la liberté et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année que le Seigneur agrée. » Et roulant le livre, il le remit au servant et s'assit. Et les yeux de tous, dans la synagogue, étaient fixés sur lui[11]. Il se mit à leur dire : « Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles cette Ecriture. »


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Luc, au début de son récit, expose lui-même ce qui l’a déterminé à entreprendre son œuvre : il nous déclare que beaucoup d’autres se sont mêlés de raconter inconsidérément des choses qu’il a examinées à fond. Aussi bien, juge-t-il nécessaire de nous débarrasser des conjectures douteuses qu’ils enseignent, et de nous donner, en son évangile, le récit fidèle des événements dont il a acquis une connaissance certaine, dans la compagnie et la fréquentation de Paul, ainsi que dans les entretiens qu’il a eus avec les autres apôtres (Eusèbe de Césarée : « Histoire ecclésiastique », III 24, 15).

[2] Excellent : titre dont on honore les hauts fonctionnaires.

[3] Théophile signifie, en grec, ami de Dieu. On ne saurait décider, avec une totale certitude, si le destinataire de l’évangile selon saint Luc est un personnage de haut rang ou tout chrétien ami de Dieu. « Il dédie son évangile à Théophile, c’est-à-dire à celui que Dieu aime. Mais il l’a également écrit pour toi, si tu aimes Dieu ; et s’il l’a écrit pour toi, reçois ce don de l’évangéliste, garde avec soin ce gage d’amitié dans l’intimité de ton cœur » (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc).

[4] Ce prologue, à la manière des historiens et des médecins de l’époque hellénistique, est dans le plus pur style grec classique : dans une phrase de style périodique (une protase - versets 1 & 2 - suivie d’une apodose - versets 3 & 4 - de trois propositions chacune), l’auteur expose l’occasion, la méthode et le but de son ouvrage. Le prologue de l’évangile selon saint Luc n’est pas sans rappeler celui du traité des matières médicales que l’on a attribué à Dioscoride : « Bien que beaucoup déjà, anciens et modernes, aient composé un traité sur la préparation des médicaments, sur leur efficacité et les expériences qui en ont été faites, très cher Arès, ja vais essayer de te montrer que ce n’est pas en vain, ni sans raison que je me porte vers un tel exposé » ; on remarquera que le prologue de l’évangile selon saint Luc commence par la même expression (puisque aussi bien) qui se rencontre souvent au début des traités de médecine, singulièrement dans celui attribué à Hypocrate. Quand saint Luc annonce un exposé suivi, il ne parle pas d’ordre chronologique mais d’ordre logique. « Il [saint Luc] ne fait pas connaître à Théophile des choses nouvelles et inconnues, mais il promet de lui exposer la vérité des choes dont il déjà été instruit. C’est pour que tu puisse connaître tout ce qu’on t’a dit sur le Seigneur ou qui a été fait par lui » (saint Bède le Vénérable : commentaire de l’évangile selon saint Luc).

[5] Quand vous lisez : « Il enseignait dans leurs synagogues, et tout le monde faisait son éloge », gardez-vous de n'estimer heureux que ces gens-là, et de vous croire privés de son enseignement. Si les Ecritures sont vraies le Seigneur n'a pas seulement parlé en ce temps-là, dans les assemblées juives, mais il parle également aujourd'hui dans notre assemblée. Et Jésus enseigne non seulement dans la nôtre, mais dans d'autres encore, et dans le monde entier. Et il cherche des instruments pour répandre ses enseignements. Priez pour qu'il me trouve, moi aussi, disposé et apte à le chanter (Origène : trente-deuxième homélie sur l’évangile selon saint Luc, I).

[6] La synagogue était l’édifice où les Juifs se réunissaient, aux sabbats, aux fêtes et aux jours de jeûne, pour prier, entendre la lecture et les explications des Ecritures (Loi et Prophètes). L’édifice qui était de forme rectangulaire, était divisé en trois nefs (les femmes, le centre, les hommes), et orienté vers Jérusalem. Une niche ou une armoire, fermée par un voile, en direction de Jérusalem, renferme les rouleaux sacrés ; un pupître sert pour la présidence et la lecture. L'institution est tardive (époque hasmonéenne). Le président dirige le service, veille au bon ordre, désigne le lecteur et le prédicateur ; le serviteur apporte les rouleaux sacrés et les remporte, applique la flagellation, annonce le sabbat au son de la trompette. « On donnait le nom de synagogue, non seulement à l'assemblée du peuple hébreu, mais encore aux édifices où il s'assemblait, comme nous donnons le nom d'église, non seulement à la société des fidèles, mais aux édifices où ils se réunissent » (saint Bède le Vénérable).

[7] Jésus voulait établir que c’était lui qui parlait par les prophètes et condamner à l’avance ceux qui prétendent que le Dieu de l’Ancien Testament est autre que celui du Nouveau et que le Christ n’a commencé qu’avec la Vierge (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, IV 44).

[8] Ce n’était pas par un pur hasard mais par une disposition de la divine Providence que ce passage s’était rencontré (Origène : trente-deuxième homélie sur l’évangile selon saint Luc, II).

[9] Il ne craint pas de reconnaître, lui qui en tant que Dieu envoie l’Esprit Saint, qu’il est conduit pour l’accomplissement de sa mission par l’Esprit Saint, et qu’il chasse les démons dans la vertu de l’Esprit Saint. lui qui est le Fils de Dieu, il est le fils de l’homme, par conséquent le vrai Messie, l’envoyé attendu (saint Athanase : deuxième discours contre les Ariens).

[10] Ce sont toutes les nations qui, en effet, ne possédaient rien, ni Dieu, ni loi, ni prophètes, ni justice, ni vertu (Origène : trente-deuxième homélie sur l’évangile selon saint Luc).

[11] En ce moment aussi, dans notre synagogue, c'est-à-dire dans notre assemblée, vous pouvez, si vous le voulez, fixer les yeux sur le Sauveur. Car, lorsque vous tenez le regard le plus profond de votre cœur attaché à la contemplation de la sagesse, de la vérité et du Fils unique de Dieu, vos yeux sont fixés sur Jésus. Bienheureuse assemblée dont l’Ecriture atteste que tous avaient les yeux fixés sur lui ! Comme je voudrais que cette assemblée mérite un témoignage semblable, que tous, catéchumènes, fidèles, femmes, hommes et enfants, regardent Jésus avec les yeux non du corps, mais de l'âme ! Lorsque, en effet, vous tournerez vers lui votre regard, sa lumière et sa contemplation rendront vos visages plus lumineux (Origène : trente-deuxième homélie sur l’évangile selon saint Luc, VI).