30e dimanche des temps ordinaires

Evangile

Suite du saint Évangile de notre Seigneur
Jésus-Christ selon Saint Marc (X 46-52).

Tandis que Jésus sortait de Jéricho[1] avec ses disciples et une foule nombreuse, un mendiant aveugle, Bartimée, le fils de Timée, était assis au bord du chemin. Et, apprenant que c'était Jésus le Nazarénien[2], il se mit à crier et à dire : « Jésus, fils de David, aie pitié de moi[3] ! » Beaucoup de gens l'interpellaient vivement pour le faire taire[4], mais il criait de plus belle : « Fils de David, aie pitié de moi ! »[5]

Et s’arrêtant, Jésus dit : « Appelez-le »[6]. On appela donc l'aveugle, et on lui dit : « Courage ! Debout ! il t'appelle ». L'aveugle jetant son manteau, bondit et courut vers Jésus. Et s’adressant à lui, Jésus dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi[7] ? » L’aveugle lui dit : « Maître, que je recouvre la vue. » Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t'a sauvé »[8]. Aussitôt l'homme recouvra la vue, et il suivait Jésus sur le chemin[9].


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Jéricho était une importante ville aux activités commerciales et agricoles de la dépression du Jourdain, à 23 kilomètres au nord-est de Jérusalem. « Jésus, était la vraie rose dont parle l’Ecriture : “ J'ai été comme la rose plantée en Jéricho, la rose toute blanche de la candeur de la sainteté, la rose toute vermeille de son sang répandu ”. Et comme la rose se trahit par son parfum avant qu'on ne s'approche d'elle, ainsi cet aveugle de loin sentit le parfum de sa divinité » (saint Augustin : sermon CCCXLIX 5).

[2] Nazarénien(évangile selon saint Marc I 24 ; X 47 ; XIV 67 ; XVI 6 ; évangile selon saint Luc IV 34 ; XXIV 19) : il s'agit d'un natif ou d'un habitant de Nazareth, « celui de Nazareth » (évangile selon saint Matthieu, XXI 11), dans l’évangile selon saint Jean (I 45) et aussi dans les Actes des Apôtres (X 38). Nazôréen (évangile selon Matthieu II 23 & XXVI 71 ; évangile selon Luc XVIII 37 ; évangile selon Jean XVIII 5 & 7 ; XIX 19 ; Actes des Apôtres II 22 ; III 6 ; IV 10 ; VI 14 ; XXII 8 ; XXIV 5 ; XXVI 9) : ce titre n'est pas seulement donné à Jésus, ainsi, quand l'avocat Tertullus, au nom du Grand-Prêtre et des Anciens, s'adresse au gouverneur Félix, il parle de la secte des Nazôréens (Actes des Apôtres, XXIV 5) ; dans les Actes des Apôtres, on emploie aussi le mot secte pour désigner les saducéens (V 17) et les pharisiens (XV 5), le mot traduit donc une observance particulière à l'intérieur du judaïsme.

[3] L'aveugle qui est assis près du chemin, qui mendie, quel est-il ? Nous l'apprendrons par celui qui s'est appelé la voie. Celui qui n'a pas encore la clarté de la lumière éternelle est vraiment aveugle (...) L'aveugle qui a déjà une certaine foi au Sauveur est assis près de la voie (...) Si celui qui a la foi au Sauveur, qui est assis au bord du chemin, ne sait pas prier pour recevoir le don de la lumière éternelle, il oublie de mendier. Il faut qu'il reconnaisse qu'il est aveugle, qu'il est dénué de tout, il faut qu'il mendie (...) Et quand il apprend que c'est Jésus qui passe, il faut qu'il se mette à l'implorer en criant ; il faut qu'il crie par toutes les fibres de son cœur, par toutes les voix de son âme :“ Jésus, fils de David, ayez pitié de moi !” (saint Grégoire le Grand : Homélie II sur les péricopes évangéliques, 2).

[4] C'est la foule des désirs charnel et le tumulte des vices qui mettent le trouble dans nos pensées et l'agitation dans nos prières, qui empêchent notre voix d'aller jusqu'à J.-C.. Il faut que nos cris soient assez forts pour les dominer (...) Quand nous voudrons nous tourner vers J.-C., les chrétiens tièdes nous diront que c'est inutile (saint Augustin : sermon CCCXLIX 5).

Ils nous crieront de nous taire quand nous ferons appel à Dieu ; ils s'interposeront entre nous et Dieu (saint Grégoire le Grand : Homélie II sur les péricopes évangéliques, 4).

Le Christ permet qu’on cherche à les faire taire, pour que leur ferveur se montre mieux et pour t'apprendre qu'ils étaient bien dignes d'être guéris (...). Apprends par là, mon cher ami, que, malgré notre bassesse et notre misère, si nous allons à Dieu de tout cœur, nous pourrons obtenir par nous-mêmes ce que nous demandons. (...) Imitons-les, nous aussi. Même si Dieu ne nous accorde pas tout de suite ce que nous demandons, même si bien des gens cherchent à nous détourner de la prière, ne cessons pas de l’implorer. Car c'est ainsi que nous attirerons le mieux les faveurs de Dieu (saint Jean Chrysostome : homélie sur l’évangile selon saint Matthieu, LXI 1).

[5] Les yeux de notre cœur sont fermés, et Jésus passe pour que nous puissions crier vers lui. Jésus passe, cela veut dire que Jésus agit dans le temps, (...) notre foi s'édifiant grâce à des actions passagères. Car nous ne croyons pas seulement en le Fils de Dieu parce qu'il est le Verbe de Dieu par qui tout a été fait : s'il était toujours resté égal à Dieu, dans sa condition divine, s'il ne s'était pas anéanti lui-même en prenant la condition d'esclave, les aveugles n'auraient pas non plus perçu sa présence et n'auraient donc pu élever la voix. Mais comme il faisait des œuvres passagères, c'est-à-dire s'humiliait, se faisant obéissant jusqu'à la mort, et la mort de la croix, les deux aveugles crièrent : « Fils de David, aie pitié de nous ! » Le fait même que le Seigneur et créateur de David ait voulu être le fils de David est quelque chose qui s'est réalisé dans le temps et que Jésus a accompli en son passage (saint Augustin : sermon LXXXVIII).

[6] Ainsi, ceux qui auront persévéré dans la fidélité aux préceptes du Christ, sans prendre garde à la foule qui voudrait les en empêcher, sans tenir compte de ce qu'elle semble suivre le Christ, c'est-à-dire qu'elle se compose de gens dits chrétiens, ceux qui auront plus aimé la lumière que le Christ devait leur faire recouvrer que redouté les bruyantes manifestations de réprobation : ceux-là, rien ne pourra les écarter. Jésus s'arrêtera, et il les guérira (saint Augustin : sermon LXXXVIII).

[7] Celui qui avait le pouvoir de donner la lumière ne pouvait pas ignorer quels étaient les désirs de l’aveugle. Mais il veut que nous lui demandions ce qu’il veut nous accorder. Il a ordonné de prier et cependant il disait : « Votre Père céleste sait ce dont vous avez besoin ». Il veut que nous priions, pour que notre cœur soit préparé à recevoir les dons de Dieu. Nous aussi, nous devons demander à Dieu, non les fausses richesses, ni les biens et les honneurs de la terre qui ne font que passer, mais la lumière : non la lumière dont l’éclat varie, qui passe, qui alterne avec la nuit, qui nous est commune avec les bêtes, mais cette lumière qui n’a ni commencement ni fin, et que nous devons contempler avec les anges (saint Grégoire le Grand : homélie II sur les péricopes évangéliques, 7).

Il veut qu’il le dise aussi pour nous apprendre que ceux-là seulement seront guéris qui reconnaîtront leurs infirmités (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc VIII 83).

[8] Le Seigneur qui lui rend la vue souligne la cause du miracle : « Ta foi t’a sauvé ». On remarquera que Bartimée ne s’est pas contenté d’implorer « Jésus le Nazarénien », il l’a imploré comme le Messie : « Jésus, Fils de David ». Il est guéri non seulement à cause de sa prière, mais parce qu’il veut suivre le Christ.

[9] Celui qui auparavant se tenait immobile, replié sur lui-même, qui ne pouvait que crier, suit donc allègrement Jésus ; et il le suit par ses vertus plus encore que par ses pas (saint Jérôme).

En se mettant ainsi à la suite de Jésus, il prouvait qu'il avait la véritable lumière, la lumière surnaturelle (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc VIII 83).

Recevons la lumière et devenons les disciples du Seigneur. Telle est bien la promesse qu’il a faite à son Père : « Je proclamerai ton nom devant mes frères, je te louerai en pleine assemblée » (Psaume XXI 23) (...) J'errais à la recherche de Dieu, mais, puisque tu m'illumines, Seigneur, par toi je trouve Dieu, de toi je reçois le Père. (...) Mettons donc fin à l'oubli de la vérité. Chassons l’ignorance et les ténèbres qui voilent notre regard comme un brouillard. (...) Alors que nous étions ensevelis dans les ténèbres et prisonniers de l'ombre de la mort, du ciel a resplendi pour nous une lumière plus pure que le soleil, plus douce que la vie d'ici-bas. Cette lumière est la vie éternelle, et tout ce qui y participe a la vie. La nuit qui se garde de la lumière, de peur, disparaît, et fait place au jour du Seigneur (saint Clément d’Alexandrie : Exhortation aux Grecs, XI 114).