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21e dimanche des temps ordinaires
Evangile
Suite du saint Évangile de notre Seigneur
Jésus avait dit, dans la synagogue de Capharnaüm[1] : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang[2] a la vie éternelle »[3]. Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, s'écrièrent : « Ce qu'il dit là est intolérable, on ne peut pas continuer à l'écouter ! »[4] Jésus connaissait par lui-même ces récriminations des disciples. Il leur dit : « Cela vous heurte ? Et quand vous verrez le Fils de l'homme monter là où il était auparavant ?... C'est l'esprit qui fait vivre, la chair n'est capable de rien[5]. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie[6]. Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas[7] ». Jésus savait en effet depuis le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient pas, et celui qui le livrerait. Il ajouta : « Voilà pourquoi je vous ai dit que personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père ». A partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s'en allèrent et cessèrent de marcher avec lui[8]. Alors Jésus dit aux Douze : « Voulez-vous partir, vous aussi ? »[9] Simon-Pierre lui répondit : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu es le Saint, le Saint de Dieu »[10]. Textes liturgiques © AELF, Paris [1] le village de Nahum (actuel Tell-Hum), en Galilée (nord-ouest du lac de Tibériade, à 4 km. de l'embouchure du Jourdain), appartient aux territoires du tétrarque Hérode Antipas. Situé aux confins des états d'Hérode Antipas et de d'Hérode Philippe II, c’est un poste de douane, sur la route de la Gaulanitide, tenu par le publicain Lévi, fils d'Alphée, le futur apôtre Matthieu (évangile selon saint Matthieu, IX 9 ; évangile selon saint Marc, II 13-17 ; évangile selon saint Luc, V 27-32). La ville est gardée par une garnison romaine commandée par le centurion du Domine non sum dignus (évangile selon saint Matthieu, VIII 5-13 ; évangile selon saint Luc ; VII 1-10). Au début de sa vie publique, Jésus y établit son centre d'action, y fit de nombreux miracles et y prêcha dans la synagogue. Il vint habiter à Capharnaüm qui est au bord de la mer, dans le territoire de Zabulon et de Nephtali, pour que s'accomplît ce qui avait été annoncé par Isaïe, le prophète, quand il dit : " Pays de Zabulon et pays de Nephtali, chemin de la mer, pays au-delà du Jourdain, Galilée des nations, le peuple qui était assis dans les ténèbres a vu une grande lumière, et pour ceux qui étaient assis dans le sombre pays de la mort une lumière s'est levée " (évangile selon saint Matthieu, IV 13-16). [2] Expression sémitique, courante, « chair et sang » désigne l'homme, l'humain, surtout par opposition à Dieu : rappelons seulement le mot de Jésus à Pierre, suivant : « Ce ne sont pas chair et sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux » (évangile selon saint Matthieu, XVI 17). Les deux termes, « chair », et « sang » ne sont pas séparables, ils ne peuvent être considérés à part, comme nous faisons du corps et du sang. Ainsi, après avoir parlé de chair et de sang, Jésus dit ensuite, à leur place, « moi ». [3] Qu'ils le comprennent, ceux qui ont reçu le baptême et qui ont déjà goûté à la grâce de Dieu. S'ils reçoivent rarement l'Eucharistie, sous prétexte de respect et de religion, ils s'excluent de la vie éternelle (...) Il devraient, au contraire, s'appliquer à se purifier au plus tôt de leurs fautes, et avec grande confiance s'approcher de celui qui est la source de la vie (Saint Cyrille d'Alexandrie : commentaire de l'évangile selon saint Luc). [4] Nombreux étaient ceux qui, dans le peuple juif, adhéraient au Christ en croyant à lui et le suivaient, sans avoir cependant tout quitté comme les Douze, et tous étaient appelés disciples (…) C'est d'eux qu’il est dit : « Ils croient pour un temps, mais au temps de la tentation ils se retirent » (évangile selon saint Luc, VIII 13) ; et il dit « beaucoup » parce que « le nombre des insensés est infini » (Ecclésiaste, I 5), et que « beaucoup sont appelés, mais peu sont élus » (évangile selon saint Matthieu, XX 16 & XXII 14). Ils dirent donc : « cette parole est dure ». On appelle dur ce qui ne se divise pas facilement et qui oppose une résistance. Une parole est donc dure parce qu'elle résiste soit à l'intelligence, soit à la volonté, lorsque nous n'arrivons pas à la saisir par l'intelligence ou qu'elle ne plaît pas à la volonté. Et de ces deux manières, cette parole leur était dure. D'une part pour l'intelligence, parce qu'elle excédait de beaucoup la faiblesse de leur intelligence. Comme ils étaient soumis à la chair, ils ne pouvaient saisir ce que le Christ avait affirmé : qu'il leur donnerait sa chair à manger. Dure d'autre part pour la volonté parce qu'il a dit beaucoup sur la puissance de sa divinité. Et même si dans leur foi ils le tenaient pour un prophète, ils ne le croyaient pas Dieu (…) Parce qu’il ne leur enseignait pas des choses qui leur plaisaient, ils voulaient susciter une occasion de partir » (saint Thomas d’Aquin : commentaire de l’évangile selon saint Jean, n° 984). [5] C'est vrai, la chair ne sert de rien, mais dans la façon que ceux-ci comprenaient. Elle ne servirait de rien si elle était semblable à la chair qu'on dépèce et qu'on porte au marché. Jésus dit : « La chair ne sert de rien », comme on a dit : « La science enfle » ; la science enfle quand elle est séparée de la charité ; mais ajoutez la charité à la science, et la science sera avantageuse, non par elle-même, mais par la charité. Seule, la chair ne sert de rien, mais que l'esprit vienne s'ajouter à la chair, et la chair servira beaucoup. Car si la chair ne servait de rien, le Verbe ne se serait pas fait chair pour habiter parmi nous. Par la chair, l'Esprit a fait beaucoup pour nous. Cette chair était un vase : regardez, non ce qu’elle était, mais ce qu'elle contenait. La chair elle-même des Apôtres nous a été utile : c'est par elle que le Verbe s'est fait entendre à nous (…) Voilà les œuvres de la chair, mais accomplies par l'esprit qui se sert de la chair comme d'un instrument (saint Augustin : Tractatus in Johannis evangelium, XXVII 5). Non, il n'a pas voulu dire que sa chair ne servait de rien, puisque tout à l'heure il disait que sans elle nous ne pouvions avoir la vie en nous. Mais il prémunissait contre une interprétation charnelle de ses paroles. Et qu'est-ce que les interpréter d'une façon charnelle ? C’est ne voir que les choses présentes et ne pas regarder au-delà. Il fallait attendre le moment opportun, et ils auraient vu que ce mystère est attranchi de toutes les lois de la vie présente. Ils entendaient toutes les paroles du Sauveur d'une façon charnelle, eux qui ne désiraient que les choses charnelles, quand il aurait fallu désirer les choses spirituelles (saint Jean Chrysostome : homélie XLVII sur l’évangile selon saint Jean, 2). [6] Il ne faut pas venir parler des choses de Dieu avec les idées de l’homme ou celles du monde, et en faisant insolemment violence aux paroles du Christ, pervertir ces salutaires paroles. Lisons ce qui est écrit, efforçons-nous de comprendre ses paroles, et alors nous serons des croyants véritables. Au sujet de la présence réelle du Christ en nous, nous ne pouvons sans folie et sans impiété dire que ce que nous avons appris de lui. Or il a dit : « Ma chair est véritablement une nourriture et mon sang un breuvage ». Il n'y a plus lieu de douter de la vérité de sa chair et de son sang. Selon la parole de notre Maître et selon notre foi, il y a là une chair et un sang véritables : et cette chair et ce sang étant reçus en nous font que le Christ est en nous et nous dans le Christ (...) et cette chair par laquelle il est avec nous est en Dieu (saint Hilaire de Poitiers : « De Trinitate », VIII 13 & 14). [7] Il n'a pas dit : « Ils ne comprennent pas ». Il dit la raison pour laquelle ils ne comprennent pas : c'est qu'ils ne croient pas. Le Prophète avait dit : « Si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas ». Il faut nous attacher par la foi pour être vivifiés par l'intelligence : celui qui ne s'attache pas, qui résiste, ne peut être pénétré par le rayon de lumière, puisqu'il se met en opposition avec lui (saint Augustin : Tractatus in Johannis evangelium, XXVII 7). [8] C’est un bonheur pour vous d’être chrétien, mais si vous l'êtes, Jésus-Christ n'y gagnera rien, et si vous ne l’êtes pas, il n'y perdra rien. Si vous êtes sans Dieu, vous serez amoindris, mais si vous êtes avec lui, Dieu n’en sera pas plus grand. Vous grandirez en vous approchant de lui, et vous diminuerez en vous éloignant de lui (saint Augustin : Tractatus in Johannis evangelium, XI 5). [9] Par cette parole, il leur prouve aussi qu'il n'a pas besoin d’eux, de leurs services ou de leur culte, que tout ce qu’il fait, il le fait pour leur salut. Et d'autre part il leur montre qu'il ne les fera pas saints malgré eux, et qu’il ne veut à son service que des hommes qui le servent librement (saint Jean Chrysostome : homélie XLVII sur l’évangile selon saint Jean, 3 & 4). [10]Capharnaüm, « A qui donc irions-nous ? » demande Pierre. Il veut dire : « Qui nous instruira comme toi des divins mystères ? » ou encore : « Auprès de qui trouverions-nous quelque chose de meilleur ? Tu as les paroles de la vie éternelle ». Elles ne sont pas dures, comme le disent ces autres disciples. Au contraire, elles conduisent à la réalité la plus extraordinaire de toutes, la vie éternelle qui est sans fin, vie exempte de toute corruption. Ces paroles nous montrent bien que nous devons nous asseoir aux pieds du Christ, le prenant pour notre seul et unique maître, et nous tenir constamment près de lui sans nous laisser distraire. Il doit devenir pour nous le guide parfaitement capable de nous conduire à la vie qui n'aura pas de fin. De cette manière, en effet, nous monterons jusqu’à la divine demeure du ciel et nous entrerons dans l'Eglise des premiers-nés, pour faire nos délices des biens que l'esprit humain ne peut comprendre. De soi, il est évident que la volonté de suivre le Christ seul et de lui être toujours uni, est chose bonne et salutaire (…) C'est en marchant toujours avec lui que le disciple donne la preuve qu'il est fidèle à le suivre et assidu à se tenir près de lui. Or, la marche en compagnie et à la suite du Christ Sauveur ne s'entend nullement dans un sens matériel, mais s'effectue plutôt par le moyen des œuvres qu'engendre la vertu. Les disciples les plus sages s'y sont fermement engagés de tout leur cœur. Ils ont refusé de se retirer avec ceux qui manquaient de foi et couraient à leur perte (saint Cyrille d'Alexandrie : Commentaire sur l'évangile selon saint Jean, IV 4). |