3ème dimanche de Pâques

Première lecture

Lecture du livre des Actes des Apôtres (II 14 & 22b-28)[1]

Le jour de la Pentecôte[2], Pierre, debout avec les onze autres Apôtres[3], prit la parole ; il dit d'une voix forte : Habitants de la Judée[4],et vous tousqui séjournez à Jérusalem[5], comprenez ce qui se passe aujourd'hui , écoutez bien ce que je vais vous dire. Il s'agit de Jésus le Nazaréen[6], cet homme dont Dieu avait fait connaître la mission en accomplissant par lui des miracles, des prodiges et des signes au milieu de vous, comme vous le savez bien. Cet homme, livré selon le plan et la volonté de Dieu, vous l'avez fait mourir en le faisant clouer à la croix par la main des païens[7]. Or, Dieu l'a ressuscité en mettant fin aux douleurs de la mort, car il n'était pas possible qu'elle le retienne en son pouvoir. En effet, c'est de lui que parle le psaume de David[8] : Je regardais le Seigneur sans relâche, s'il est à mon côté, je ne tombe pas. Oui, mon cœur est dans l'allégresse, ma langue chante de joie ; ma chair elle-même reposera dans l'espérance : tu ne peux pas m'abandonner à la mort ni laisser ton ami connaître la corruption. Tu m'as montré le chemin de la vie, tu me rempliras d'allégresse par ta présence. >»


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Extraite du premier discours de saint Pierre aux Juifs de Jérusalem et de Judée, cette proclamation (le kérygme) servira de canevas aux discours qui suivront ; elle reflète la prédication apostolique des premiers temps, d'où surgiront nos Evangiles. Saint Pierre répond ici aux questions posées aux Juifs par le comportement insolite et exalté des disciples de Jésus après l’effusion de l'Esprit au jour de la Pentecôte. Leurs paroles intriguent, comme les paroles de Jésus avaient intrigué ses auditeurs, et plus encore car ils parlent plusieurs langues. Seraient-ils fous ou seraient-ils ivres ? Oui, c'est bien l’ivresse, mais celle que donne l’Esprit, comme l'avait annoncé le prophète Joël (XV 21 : passage absent de notre texte). Au lieu de répondre directement, saint Pierre retrace l'historique de Jésus, le Nazaréen que Dieu avait accrédité auprès des juifs par des miracles, et qu'ils ont livré et fait crucifier. Puis il proclame à deux reprises (versets 24 & 32), que Dieu l'a ressuscité, intercalant entre les deux une parole de David (Psaume XVI 8-11), citée et commentée comme prophétie de cette résurrection de Jésus. Jésus a été élevé dans la gloire de Dieu et il a reçu du Père l'Esprit qu'il a répandu sur ses disciples. Donc, au sommet de ce discours, I'événement central de la résurrection. En amont, les prophéties ; en aval, le témoignage des disciples, l’Esprit-Saint étant le garant des deux.

[2]La Pentecôte était pour les Juifs la fête des Semaines ou de la Moisson ou des Tentes, qui clôturait la cinquantaine pascale. C’était à l'origine une fête agraire pour les prémices de la moisson du froment, célèbrée « sept semaines après que la faucille avait commencé à couper les épis d'orge » (Deutéronome, XVI 9). Elle se célébrait« au moment où on allait mettre la faux à la moisson. C'était la figure, voici la vérité. Il fallait promener dans le monde entier la faux de la Parole et y recueillir une riche moisson d'âmes. C'est à ce moment que descend l'Esprit Saint semblable à une faux tranchante »(saint Jean Chrysostome : homélie IV sur les Actes des Apôtres). Deux siècles avant le Christ, on y rattacha la conclusion de l'Alliance, ce fut la fête des Serments.

[3] Le onzième apôtre qui a été élu pour remplacer Judas, est Matthias dont le premier chapitre des Actes des Apôtres racontent l’élection (I 15-26) La Tradition rapporte que Matthias, dont le nom signifie donné (donatus), serait né à Bethléem d'une illustre famille de la tribu de Juda ; invité aux noces de Cana, il aurait été choisi par le Seigneur comme un des 72 disciples. Clément d'Alexandrie (150-215) qui le présente comme un prédicateur de la pénitence, combattant ferme contre la chair, lui attribue un Livre des Traditions, et Origène (185-253) parle d'un Evangile qu’il aurait écrit. On a perdu ces textes que le pape Innocent I° (401-417) a condamnés comme apocryphes. Lorsque les apôtres se dispersèrent, Matthias, selon les saints Sophrone, Nicéphore et Dorothée, alla jusqu'en Ethiopie où il resta près de trente-trois ans ; les juifs ameutèrent contre lui les populations qui l'assommèrent avant de le décapiter, vers 63. D'autres dirent qu'il resta en Palestine où, en 61, à Giscala, il fut dénoncé au Grand-Prêtre Ananias qui, après l'avoir interrogé, le fit lapider et achever à la hache. Enfin, on le situa en Macédoine et dans quelques autres pays au-delà du Pont-Euxin.

[4] Dans le texte des Actes des Apôtres, saint Pierre ne dit pas « habitants de la Judée et vous tous qui séjournez à Jérusalem », mais « Israélites ».

[5] Parthes, Mèdes et Elamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, des bords de la mer Noire, de la province d'Asie, de la Phrygie, de la Pamphilie, de l'Egypte et de la Libye proche de Cyrène, Romains résidant ici, Juifs de naissance et prosélytes, Crétois et Arabes (Actes des Apôtres, II 9-11).

[6] Contrairement à ce que l’on lit dans cette traduction française, saint Pierre préfère à l’adjectif de Nazaréen (habitant de Nazareth) celui de Nazôréen que l’on trouve ailleurs dans le Nouveau Testament (évangile selon saint Matthieu, II 23 & XXVI 71 ; évangile selon saint Luc, XVIII 37 ; évangile selon saint Jean, XVIII 5. 7 & XIX 19 ; Actes des Apôtres, II 22, III 6, IV 10, VI 14, XXII 8, XXIV 5, XXVI 9). Ce titre n'est pas seulement donné à Jésus : quand l'avocat Tertullus, au nom du Grand-Prêtre et des Anciens, s'adresse au gouverneur Félix, il parle de la secte des Nazôréens (Actes des Apôtres XXIV 5) ; dans les Actes des Apôtres, on emploie aussi le mot secte pour désigner les saducéens (V 17) et les pharisiens (XV 5), le mot traduit donc une observance particulière à l'intérieur du judaïsme.

[7] Dans le texte des Actes des Apôtres, saint Pierre ne dit pas des païens, mais des sans-lois.

[8] Psaume XVI (versets 8 à 11) où le psalmiste exprime sa confiance inaltérable en Dieu qui ne permettra pas que son ami soit séparé de lui.