Fête du Baptême du Seigneur

Evangile

Suite du saint Évangile de notre Seigneur
Jésus-Christ selon Saint Matthieu (III, 13-17).

Jésus, arrivant de Galilée, paraît sur les bords du Jourdain1, et il vient à Jean pour se faire baptiser2 par lui3. Jean voulait l'en empêcher4 et disait : « C'est moi qui ai besoin de me faire5 baptiser par toi, et c'est toi qui viens à moi ! Mais Jésus lui répondit : Pour le moment, laisse-moi faire ; c'est de cette façon que nous devons accomplir parfaitement ce qui est juste6. » Alors Jean le laisse faire. Dès que Jésus fut baptisé, il sortit de l'eau ; voici que les cieux s'ouvrirent7, et il vit l'Esprit de Dieu8 descendre comme une colombe9 et venir sur lui. Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui, j'ai mis tout mon amour10. »


Textes liturgiques © AELF, Paris


1 Le Jourdain est le seul véritable fleuve de la Palestine. Il prend sa source au pied de l’Hermon où il se forme de trois petits cours d’eau (le Nahr Banijas, le Nahr el Leddan et le Nahr el Hasbani) ; après de nombreux méandres, il court sur près de trois cents kilomètres, traversant le lac Mérom (le lac Houlé) et le lac de Génésareth (mer de Galilée, lac de Tibériade ou lac de Kinnereth), le Jourdain se jette dans la mer Morte ; il a un certain nombre d’affluents dont les trois principaux, sur la rive gauche, sont le Yarmouk, le Ouadi Yabis et le Jabbok ; la pente du Jourdain est très forte puisqu’il naît à plus quarante-cinq mètres et qu’il finit à moins trois cent quatre-vingt-dix mètres ; son débit est de quatre-vingt-quinze mètres cubes à la seconde. Il est probable que son nom dérive de la racine yrd qui signifie descendre.

2 La religion juive connaît l’immersion comme moyen de purification légale : pour la purification du lépreux guéri (Lévitique XIV 8), pour effacer l’impureté sexuelle (Lévitique XV 16-18), pour laver l’impureté qui résulte de l’attouchement d’un cadavre (Nombres XIX 19). Aux prescriptions de la Loi, les scribes ont ajouté d’autres bains qui opèrent une pureté légale sans avoir un caractère directement moral, même s’ils permettent de passer du domaine profane au domaine sacré ou inversement. Des bassins d’eau pure ou des piscines rituelles permettaient de se purifier. Le Baptême de Jean manifeste sa différence d’avec les rites de pureté pharisiens sur un point essentiel : conféré sous le signe de la conversion morale, il reprend l’essentiel de la prédication de l’Ancien Testament pour la placer dans la perspective du Royaume de Dieu qui approche. Quelques paroles prophétiques exprimaient déjà le symbolisme du bain de l’eau en vue de la purification intérieure (Psaume LI 9, Isaïe I 16, Ezéchiel XXXVI 25, Zacharie XIII 1). Le baptême de Jean est appelé un baptême pour la rémission des péchés : il annonce le salut en se substituant en quelque sorte aux rites de pardon de l’Ancienne Alliance. Ce baptême s’accompagne d’une orientation morale (charité, justice, droiture) qui prépare la venue du Royaume de Dieu ; le baptême de Jean ne donne la purification intérieure que dans la mesure où Dieu accepte les dispositions intérieures de celui qui le reçoit.

L’homme étant composé d’un corps et d’une âme, il faut, pour le sanctifier, un rite extérieur et une vertu spirituelle. Pendant que le corps est lavé avec l’eau, l’âme est purifiée par l’Esprit. Et c’est pourquoi, pendant que nous accomplissons un rite extérieur, nous invoquons une grâce supérieure. C’est pourquoi, autre fut le baptême de pénitence, autre fut le baptême de la grâce : celui-là n’avait que l’élément matériel, celui-ci réunit les deux éléments. En s’attribuant le baptême de pénitence, Jean déclarait non seulement par ses paroles, mais par son œuvre qu’il n’était point le Christ. Faire pénitence de ses fautes, c’est l’œuvre de l’homme; faire descendre la grâce, c’est la part de Dieu (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 79).

3 Il veut recevoir le baptême afin d'ensevelir le vieil Adam dans les eaux. Il relève avec lui le monde qui était comme englouti avec lui (saint Grégoire de Nazianze : discours XXXIX 17).

4 Celui qui est le plus grand ne peut être béni ni sanctifié par celui qui est moindre. Le médecin ne vient pas près du malade pour être guéri par lui ... Comment moi, qui ne suis pas digne de dénouer la courroie de votre chaussure, oserai-je toucher votre tête sacrée ? ... Comment pourrais-je prononcer des prières sur vous, sur vous qui recevez les prières, même de ceux qui vous ignorent ? (saint Grégoire le Thaumaturge).

5 Il vient, non pour être sanctifié, mais pour sanctifier les eaux, et par sa chair qui n'a point connu le péché leur donner une vertu sanctifiante (saint Ambroise de Milan : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 91).

6 Il devait se faire en tout semblable à ses frères, afin de devenir un grand prêtre miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour expier les péchés du peuple (épître aux Hébreux, II 17).

7 Les cieux s’ouvrirent pour que vous sachiez que, par le baptême, le ciel s’ouvre pour vous, que Dieu vous appelle à la patrie céleste et que vous ne devez plus avoir rien de commun avec la terre (saint Jean Chrysostome : homélie XII sur l’évangile selon saint Matthieu, 2).

8 Si l’Esprit Saint descendit sur lui à son baptême, c’était pour le manifester, et non parce qu’il en avait besoin. C’était aussi afin de nous montrer que les dons du Saint-Esprit avaient leur terme et leur centre en lui. Et, en effet, après Jésus-Christ, la prophétie s’arrête, et c’est de Jésus-Christ que procèdent toutes les grâces qui sont répandues sur les fidèles, dans la mesure qu’il détermine lui-même (saint Justin : Dialogue avec Tryphon).

Tandis que l’eau ne lave que l’extérieur, le Saint-Esprit, comme le feu, pénétrera au plus intime de vous-mêmes, il détruira tout ce qui est mauvais (saint Jean Chrysostome : homélie XI sur l’évangile selon saint Matthieu, 4).

9 C’était la colombe qui, au jour du Déluge, avait apporté à Noé le rameau d’olivier, annonçant la paix à la terre ; c’est la colombe qui aujourd’hui annonce le vrai libérateur. Elle ne vient plus pour faire sortir une famille de l’arche, mais pour conduire au ciel toute la famille humaine ; au lieu du rameau d’olivier, elle apporte aux hommes l’adoption divine. N’abandonnons jamais la colombe pour suivre le serpent (Saint Jean Chrysostome).

10 Ce n’est plus l’enfantement virginal annoncé par l’Ange, ni l’étoile conduisant les mages, ni les adorations rendues à l’enfant au berceau, ni le témoignage de celui qui baptise, ni la vertu du baptisé qui nous le révèlent : c’est le Père lui-même, parlant du haut du ciel, et disant « Celui-ci est mon Fils. » Son nom, son nom propre, c’est celui-là, « mon Fils » ; j’ai pu donner ce nom comme surnom à d’autres qui avaient déjà leur nom : son nom propre, c’est celui-là, « mon Fils » (saint Hilaire de Poitiers : « De Trinitate »).

Tout cela s'est passé à Béthanie-de-Transjordanie, à l'endroit où Jean baptisait (Saint Jean, I 28). Et Jean témoigna, en disant : « J'ai vu l'Esprit descendre, comme une colombe, venant du ciel, et il est demeuré sur lui » (Saint Jean, I 32).