6 août

Fête de la Transfiguration du Seigneur

Sommaire :

Histoire du Mont Thabor

Deux leçons de la Transfiguration




Histoire du Mont Thabor

Situé aux confins des territoires d'Issachar, de Nephtali et de Zabulon, le Thabor, point naturel de défense contre les invasions, se prêtait aux rassemblements nationalistes, dès l'entrée dans la terre de Canaan des Hébreux qui y faisaient des sacrifices d'expiation. Alors que Yabîn, roi de Canaan, opprimait les Hébreux de la plaine, la prophétesse Débora convoqua sur le Thabor dix mille guerriers, commandés par Baracq, qui, sur son ordre, dévalèrent la montagne et bousculèrent l'importante armée de Yabîn dont le chef, Sisera, fut tué par Yaël, femme d'Héber le Génite, chez qui il s'était enfui (Livre des Juges IV et V).

Après qu'ils furent retombés dans l'idolâtrie et pendant que les Madianites et les Amalécites ravageaient la plaine d'Yizréel, les Hébreux se réfugièrent dans des grottes, sur les flancs du mont Thabor.

Pour les Arabes, le Thabor, le Djebel-el-Toûr, c'est la montagne par excellence, la Sainte montagne. Au sommet, long de 1200 m. et large de 400 m., il s'élève à 600 m. au-dessus de la plaine d'Esdrelon, à 562 m. au-dessus du niveau de la Méditerranée. On voit, au sud, les collines du Petit Hermon, avec, sur ses flancs Naïm et Endor, puis, au-delà, les monts de Gelboé et de Samarie ; au nord, le grand Hermon enneigé, au-delà du mont de Haute-Galilée et du Golân. Le Thabor a toujours attiré les pèlerins qui, jadis, gravissaient les 4340 degrés taillés dans la roche.

Dès l'entrée des Hébreux en terre de Canaan, le Thabor, aux confins des territoires d'Issachar, de Nephtali et de Zabulon, fut un point naturel de défense contre les invasions ; il se prêtait aux rassemblements. On s'y réunissait aussi pour les sacrifices d'expiation. Sous les Juges, alors que Yabîn, roi de Canaan, opprimait les Israélites, la prophétesse Débora convoqua sur le Thabor dix mille soldats commandés par Baraq. Sur son ordre, les combattants dévalèrent de la montagne et bousculèrent l'armée de Yabîn, dirigée par Sisera. Celui-ci s'enfuit chez Yaël, femme de Héber le Génite, qui le tua. La victoire inspira le cantique de Débora et de Baraq (Juges IV-V). Revenus à l'idolâtrie, les Hébreux tombèrent aux mains des Madianites et des Amalécites, qui ravagèrent les récoltes de la plaine d'Yizréel. Les Hébreux durent se réfugier dans les grottes qu'on retrouve encore sur le flanc sud du mont. La renommée du Thabor inspira les prophètes. Annonçant l'invasion de l'Égypte par Nabuchodonosor, Jérémie le compare au Thabor parmi les monts (Psaume LXXXIX 13), saint Jérôme trouvait dans ces oracles une allusion à la Transfiguration.

Lors de la révolte juive contre les Romains (66), pour échapper aux légions de Vespasien conduites par Placidus, Flavius Josèphe, gouverneur de Galilée, se retira sur le Thabor et, en quarante jours, édifia trois kilomètres de murs. Mais, en octobre 67, Placidus attira les Juifs dans la plaine et les écrasa, ce qui lui permit de s'emparer de la montagne.

Bien sûr, l'événement qui a immortalisé le Thabor, c'est la Transfiguration du Seigneur, décrite par les synoptiques. Une tradition situe également sur le Thabor une apparition du Christ à l'ensemble de ses apôtres et de ses disciples, peut-être les cinq cents frères dont parle saint Paul (1 Corinthiens XV 6). En contrebas de la montagne, au village de Daboûrieh, on conserve, depuis le Moyen-Âge, le souvenir de la parole de Jésus : Ne dites mot à personne,. prononcée alors qu'il descendait du Thabor avec Pierre, Jacques et Jean. À cet endroit fut construite une église, signalée par les pèlerins à partir de la fin du XIIIème siècle et dont subsistent des vestiges.

On ignore la date du premier sanctuaire du Thabor. Un siège épiscopal y était attaché au VIème siècle, mais, semble-t-il, l'évêque avait sa cathédrale dans une localité voisine, peut-être Hélénopolis, au pied du mont.

L'Anonyme de Plaisance (570), le premier à témoigner d'édifices cultuels sur le Thabor, signale trois basiliques érigées en souvenir des trois tentes dont parlait Pierre à Jésus. Il s'agit vraisemblablement d'une basilique et d'une chapelle avec abside orientée, dont des fragments de mosaïque, restaurés par les croisés, sont dans l'actuelle chapelle Saint-Élie (tour sud de la façade), contemporaines d'une mosaïque (sans doute celle du baptistère, au sud de la moderne basilique), ainsi que les graffiti d'une grotte située au nord. En 670, Arculfe trouve, outre les trois basiliques, un monastère entouré d'un mur d'enceinte. En 724-726, saint Willibad ne parle que d'une église dédiée au Sauveur, à Moïse et à Élie. Le monastère est toujours là.

Occupée par les Sarrasins depuis 637, la Galilée fut reconquise en 1099 par Tancrède qui confia le Thabor à des bénédictins. Les moines latins reconstruisirent l'ancienne basilique à trois nefs, sur son plan primitif, tout en conservant la "confession" transformée en crypte sous la nef principale. Près de l'église, ils édifièrent un monastère et un hospice pour les pèlerins. Baudouin Ier , roi de Jérusalem, les dota largement, mais, en 1113, les moines et leurs serviteurs - 72 personnes - furent massacrés par Mawdoûd, atabeg de Mossoul.

En 1115, après le retour des croisés, les religieux regagnèrent le Thabor, et leur abbé reçut le titre d'archevêque et le pallium, pour honorer la sainte montagne et son église Saint-Sauveur. Lors d'une nouvelle incursion (1183) les Sarrasins tuèrent les moines grecs, les bénédictins retranchés derrière leurs murs, échappèrent à la mort, mais, après la défaite des croisés à Hattin (1187), ils durent abandonner définitivement le Thabor.

En 1251, saint Louis vint prier sur le mont. Le pape Alexandre IV confia le sanctuaire aux chevaliers de Saint-Jean que les hordes de Baibars contraignirent à l'abandon (1263). Une fois encore, les édifices disparurent, complètement rasés. Cependant, les Arabes considéraient le Thabor comme intouchable : ils se jugeaient indignes d'habiter la montagne sainte.

Le lieu devint cher aux Franciscains qui, parfois, y venaient prier depuis Nazareth, voire depuis Jérusalem. En 1631, l'émir des Druzes et de la Galilée, Fakhr-ed-Dîn, leur en concéda la possession, grâce à l'entremise de Francesco de Verazzano, consul à Saïda du duc de Toscane et qui avait offert l'hospitalité à l'émir exilé. Le meurtre de celui-ci empêcha les franciscains de reconstruire sanctuaire et couvent, mais ils purent célébrer plus souvent la messe dans un ancien bain turc aménagé en chapelle.

Vers 1858, ils entreprirent des fouilles, interrompues d'ailleurs aussitôt. En 1870, une accalmie permit au P. Giuseppe Baldi d'envisager l'installation des franciscains sur la montagne. On édifia une petite église, le couvent et la Casa Nova pour les pèlerins, puis on releva en partie l'enceinte pendant qu'on retrouvait les restes de l'église des Vème-VIème siècles et les chapelles de Moïse et d'Élie, mais le manque de fonds arrêta les recherches.

En 1919, on célébrait le septième centenaire de la venue de saint François en Terre sainte, et le 21 octobre, le cardinal Giustini, légat pontifical, posa la première pierre de l'actuelle basilique.

Le 16 mai 1921, les fouilles et le nettoyage furent repris par trois cents ouvriers. À une profondeur de 10 m, on dégagea les murs de la crypte de l'ancienne église, tandis qu'on restaurait la forteresse sarrasine au sud-est et, au nord, la salle capitulaire, le réfectoire, la cuisine du monastère bénédictin ainsi que le bain turc. Au sud, on répara l'antique baptistère, avec son pavement de mosaïque à double bordure. Enfin, sur 5 km, on ouvrit une voie carrossable et l'on remit en état les 12 km de la route reliant le village d'el-Afoûlet au pied de la montagne.



Deux leçons de la Transfiguration

Au jour de la Transfiguration, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean pour les conduire sur une montagne élevée et solitaire. Il est délicat le travail qu'impose la Transfiguration du Seigneur, aussi le bon Maître prend soin de nous indiquer de quelle façon nous l'accomplirons. Sa leçon tient en deux mots : 1° Sur une montagne élevée, 2° Solitaire.


1° Sur une montagne élevée. A propos de ces paroles, saint Thomas d’Aquin écrit : « Jésus nous enseigne en cela qu'il est nécessaire à tous ceux qui désirent contempler Dieu de ne pas s'attacher aux basses voluptés mais de s'élever sans cesse par l'amour vers les biens célestes. » Pour se transfigurer il est requis de s'élever. Tant qu'on reste incliné vers la terre, courbé lourdement sous le poids des passions, esclave des jouissances qu'elles réclament, on doit renoncer à tout embellissement de l'âme. Pour arriver à ressembler à Dieu, il faut le contempler donc, il faut monter. Or, on s'essouffle à gravir une montagne, on peine pour gagner un sommet. Au fait, toute transformation en mieux est conditionnée par un douloureux effort : le laboureur brise la terre afin qu'elle fructifie ; le savant travaille pour savoir plus et mieux.

L'âme consentira à ce qui lui coûte, afin d’éliminer les éléments de laideur qu'elle renferme, les ternissures qui la couvrent. Elle se dégagera des créatures qui, presque toujours, sont un écran entre elle et la lumière ; le détachement est une recornmandation essentielle de l'Evangile, détachement de tout, de tous, surtout de soi-même, car on ne tient aux choses et aux gens qu'à cause de soi-méme ; dès lors qu'on ne se trouve plus en eux, par un avantage ou un autre, on ne s'y complaît plus, on les met de côté.

Haute et rude est la cime à atteindre, âpre la côte à monter. Il n'y a pourtant pas à hésiter ; c'est question de vie ou de mort. Pour nous surtout, qui voulons non seulement nous transfigurer, mais entraîner les autres à le faire, la vie doit être une ascension incessante, quelque laborieuse qu'elle soit.


O Jésus, attirez-moi à vous, que votre amour ne me laisse point à moi-même. Sans y mettre la témérité irréfléchie de Pierre, je vous dis du fond de mon âme : « Je vous suivrai partout où vous irez. (Evangile selon saint Matthieu,VIII 19.) »


2° Solitaire. La montagne où Jésus conduit les trois apôtres privilégiés était à l'écart, enveloppée de silence, en une atmosphère favorable à la contemplation, à la prière ardente. Voila une seconde condition nécessaire à la transfiguration.

D'abord, une attentive fixation du modèle s'impose, l’idéal doit saisir les pensées, enflammer les sentiments donc, que l'on contemple longuement. Puis, reproduire les traits divins déborde les possibilités humaines, il faut le secours d'en-haut : donc que l'on prie, et avec ferveur.

En un mot, c'est l'oraison vraie, l'oraison régulière quotidienne, l'esprit d'oraison, qui permettent l'ascension pénible, qui réalisent la transformation progressive. Jamais une âme frivole ou évaporée, une âme qui vit dans l'étourdissement de l'extérieur, une âme vide de prière, ne pourra arriver à s'améliorer, à s'embellir comme elle le doit. Aussi bien, l'oraison doit être un exercice auquel on tienne comme à la vie : « Priant en esprit en tout temps (Epîte de saint Paul aux Philippiens, VI 18.)», dit saint Paul ; et saint Cyprien : « Il est bon de prier sans cesse pour ne pas s'éloigner du royaume céleste » ; c'est par l'oraison assidue, ajoute-t-il, qu'on se maintient constant dans son effort.


O mon Dieu, accordez-moi « l'esprit de grâce et de prière », par quoi je me tiendrai constamment près de vous, « Je mets le Seigneur constamment sous mes yeux.(Psaume XV 8.) » Ainsi pourrai-je espérer, enveloppé de votre lumière, me transfigurer sous son influence et attirer la bienveillance de votre regard.