7 août

Saint Sixte II,
Pape et Martyr, et ses compagnons
saint Gaétan de Thienne
sainte Julienne du Mont-Cornillon

Sommaire :

Annonce du martyr de Sixte II


Biographie de Saint Gaétan

Prière de Saint Gaétan


Biographie de Sainte Julienne



Annonce du martyr de Sixte II

Sachez-le, frères très chers : Sixte II fut exécuté le 6 août 258, dans la catacombe de Prétextat, avec quatre de ses diacres. En effet, les préfets poussent activement la persécution, par confiscation des biens et mise à mort. Veuillez avertir nos collègues dans l'épiscopat de ce décès du Saint-Père. En effet, il importe de soutenir nos frères et de les préparer au combat. Il convient que chacun de nous pense moins au trépas qu'à l'immortalité. Ne faudra-t-il pas bientôt manifester plus de joie que de crainte ? En effet, soldats de Dieu et du Christ, nous serons sans doute immolés, tout comme Sixte II vient de l'être.

Saint Cyprien de Carthage,
lettre LXXX.



Biographie de Saint Gaétan

Troisième enfant du condottiere Gaspard de Thiène et de la comtesse Maria Porto, Gaétan de Thiène naquit à Vicence en octobre 1480. C'est en souvenir d'un de ses oncles, chanoine et professseur à l'Université de Padoue (mort en 1465), qu'il reçut au baptême le prénom de Gaétan. Orphelin de père dès l'âge de deux ans, il fut éduqué par sa mère, fille spirituelle des dominicains de Santa Corona de Vicence. Après avoir fait ses humanités à Vicence, il fréquenta l'Université de Padoue où il conquit le doctorat in utroque jure (17 juillet 1504). La même année, il reçut la tonsure des mains de l'évêque de Vicence, Pietro Dandolo. Très soucieux de l'éducation religieuse et de la promotion sociale des paysans vivant sur les terres que sa famille possédait à Rampazzo (province de Vicence), il y érigea en 1505, avec son frère Battista, une église dédiée à sainte Marie-Madeleine pour qui la Renaissance avait une grande dévotion.

Désireux d'accroître sa culture, Gaétan partit à Rome (1507) où, remarqué par Jules II, il fut nommé protonotaire apostolique et scrittore des lettres pontiflcales. Il reçut en bénéfice deux églises paroissiales du diocèse de Vicence : Santa Maria di Malo (16 octobre 1507) et Santa Maria di Bressanvido (20 novembre 1507) ; il en confia la cura animarum à des desservants de son choix et de vertu exemplaire. A Rome, il habitait près de l'église San Simone ai Coronari, sur l'actuelle place Lancellotti, non loin du Génois Giambattista Pallavicini, évêque de Cavaillon, puis cardinal, dont il fut l'auxiliaire et le familier, et qu'il assista à l'article de la mort (août 1524). Par la suite, il s'efforça d'aplanir le conflit qui avait éclaté en 1509 entre Jules II et Venise à propos de la Ligue de Cambrai.

Après un bref séjour à Padoue et dans son église paroissiale de Santa Maria di Malo (1512), Gaétan retourna à Rome où il entra dans l'Oratorio del Divino Amore (1515) qui rassemblait alors l'élite des ecclésiastiques de la Ville Eternelle et « la plupart des hommes qui désiraient réellement la réforme de l'Eglise » ; les membres de cette confrérie se réunissaient en l'église de Santa Dorotea, au Transtévère, et leurs activités caritatives s'orientaient vers les incurables du refuge de San Giacomo in Augusta, dont Gaétan deviendra plus tard le custode. Dans ce climat tout imprégné de spiritualité évangélique, la vocation sacerdotale de Gaétan arriva à maturité. Grâce aux dispenses canoniques qui lui furent concédées par Léon X, il fut ordonné sous-diacre, diacre et prêtre les 27, 28 et 29 septembre 1516, par Mgr Francesco Bertoli, évêque titulaire de Milepotamo. Pour mieux s'y préparer spirituellement, il remit la célébration de sa première messe à l'Epiphanie de 1517. Cette année là, il commença de correspondre avec la sœur Laura Mignani, une mystique de Brescia, qu'il prit comme guide spirituel. Dans sa lettre du 28 janvier 1528, il révèle qu'au cours de la nuit de Noël 1517, en la basilique de Sainte-Marie-Majeure, lui apparut la Vierrge qui déposa l'Enfant-Jésus dans ses bras.

Gaétan retourna à Vicence en avril 1518. Il s'agrégea (9 janvier 1519) à la Compagnie des Saints-Clément-et-Jérôme qu'il réforma selon la nouvelle spiritualité de l'Oratoire du Divin Amour. Il fit de mème avec la Compagnie du Saint-Corps du Christ, de Vérone, dont il devint membre le 10 juillet 1519. Les registres de celle-ci témoignent de la ferveur avee laquelle il soutenait la vie spirituelle de ses confrères, notamment en les exhortant à la fréquentation des sacrements. Gaétan de Thiène est d'ailleurs considéré comme l'un des premiers zélateurs de la communion fréquente à son époque. En 1520, à Vicence, il réorganisa l'hôpital de la Miséricorde qu'il transforma en refuge pour incurables et l'unit in spiritualibus à celui de San Giacomo de Rome.

Après le décès de sa mère (novembre 1520) et le mariage d'Elisabetta Porto, l'unique nièce qui lui restait, Gaétan put se consacrer totalement à l'apostolat. En 1522, sur les conseils du célèbre dominicain Giambattista da Crema qu'il avait choisi comme directeur spirituel, il gagna Venise. Au cours du carême de la même année, aidé par quelques nobles dames vénitiennes, il y fonda de ses deniers l'Ospedal Nuovo pour incurables (sur le canal de la Giudecca).

A la fin de 1523, Gaétan retourna à Rome, avec le projet de s'unir avec d'autres clercs dans la pratique d'une vie commune. Il trouva ses premiers compagnons et collaborateurs parmi les membres de l'Oratoire du Divin Amour : Giampietro Carafa (le futur pape Paul IV), Bonifacio de' Colli et Paolo Consiglieri. Tous les quatre renoncèrent à leurs bénéfices ecclésiastiques, et avec l'autorisation de Clément VII (bref du 24 juin 1524), ils prononcèrent leurs voeux solennels le 14 septembre 1524, en la basilique Vaticane, en présence de Mgr C. Bonciani, évêque de Caserte, délégué par le Pape. Ainsi était créé le premier des ordres modernes de clercs réguliers. La base de l'Institut était la vie commune dans la pratique des conseils évangéliques. L'accent était mis sur la pauvreté la plus rigoureuse La norme fondamentale du nouvel institut était le renouveau de la Vita apostolica telle qu'elle est décrite dans les Actes des Apôtres. Les célébrations communautaires de la liturgie eucharistique et chorale ainsi que la cura animarum devaient être exemplaires. Ayant renoncé aux rentes et à la mendicité, les quatre compagnons espéraient que l'exercice de leur ministère et la charité des fidèles leur procureraient des ressources suffisantes. Ils entendaient d'ailleurs s'en remettre totalement à la Divine Providence.

La première demeure des Théatins (ainsi nommés parce que Carafa, qui fut leur premier supérieur, portait le titre d'episcopus theatinus, c'est-à-dire de Chieti) fut située au Champ de Mars, près de l'actuelle église de San Nicola dei Prefetti. Ils résideront ensuite dans une maison du Pinclo, près de l'actuelle Villa Medici. Celle-ci devint rapidement un foyer d'intense spiritualité sacerdotale. Gaétan fut agressé et subit les sévices des troupes d'occupation lors du sac de Rome en 1527. Lui et ses compagnons, qui étaient alors au nombre de douze, furent libérés par un capitaine espagnol. Il gagna Venise, où les Théatins, en novembre 1527, se fixèrent définitivement en l'église San Nicola dei Tolentini. Le 14 septembre 1527, au cours du chapitre général, Gaétan fut élu supérieur de l'Institut, charge qu'il conserva pendant trois ans. Comme à Rome, la communauté devint sous sa direction un centre de réforme et de spiritualité. Avec Giampietro Carafa, il dirigea et soutint saint Jérôme Emilien dans ses œuvres en faveur de l'enfance abandonnée. Il fut aussi très lié avec Bonaventura da Centis, artisan de la réforme de la province franciscaine de Venise, avec le dominicain Bartolomeo da Pisa, avec le bienheureux Paolo Giustiniani qui œuvrait à la réforme des Camaldules, avec l'humaniste et poète Marcantonio Flaminio qui demanda en vain d'être reçu parmi les Théatins, avec le célèbre imprimeur de Salo Paganino Paganini, qu'il invita à Venise pour installer une imprimerie près du couvent des Théatins.

Saint Gaétan œuvra tout particulièrement avec Gian Matteo Giberti à la réforme du diocèse de Vérone, où il résida probablement en 1531et 1532 et de nouveau en 1541. La communauté pouvait désormais élargir le champ de ses activités pastorales et caritatives aux oratoires et hôpitaux de Vicence, Vérone, Padoue, Brescia et Salo (lac de Garde). Mais c'est sur l'Oratoire de Venise que l'influence des Théatins fut particulièrement intense et elle était d'ailleurs plus nécessaire aussi en raison de la position stratégique qu'il occupait du point de vue religieux.

C'est à Venise que Gaétan et ses clercs réguliers entrèrent pour la première fois en contact avec les courants luthériens. En 1530, le nonce Averoldo Altobello confia à Carafa le procès (suivi d'une condamnation) du conventuel Girolamo Galateo qui manifestait des sympathies pour Luther. Dans le bref du 8 mai de la même année qu'il adressa à Carafa, Clément VII loua son zèle et l'encouragea à poursuivre dans cette voie. Le Memoriale que Carafa envoya à Rome le 4 octobre 1533 (il y mettait à nu les plaies de l'Eglise et indiquait les moyens les plus efficaces pour promouvoir la réforme et réprimer les erreurs) témoigne de l'esprit qui animait les clercs réguliers dans leur volonté de préserver la foi et de promouvoir la réforme catholique.

Avec l'autorisation du Saint-Siège (bref de fondation, confirmé par un autre bref de Clément VII du 21 mars 1529), les Théatins furent à la base d'un renouveau d'un autre genre sur le plan liturgique : il s'agissait de la révision soit des textes soit des célébrations liturgiques qu'ils devaient expérimenter dans leur communauté et soumettre ensuite à l'approbation du Siège apostolique. Si la réforme du Petit office de la Sainte Vierge fut rapidement menée à bien. Celle du Bréviaire et du missel romain fut plus longue et plus ardue. Lorsque Pie V rendit obligatoires le Bréviaire puis le Missel romains par les bulles Quod a nobis (9 juillet 1568) et Quo primum (14 juillet 1570), on put se rendre compte à quel point l'œuvre des Théatins et les critères qu'ils adoptèrent pour réaliser cette réforme avaient été utiles.

Au cours de l'été 1533, accompagné par le bienheureux Giovanni Marinoni, Gaétan gagna Naples, appelé par le Conseil de la cité. Après avoir demeuré à Santa Maria della Misericordia, puis à Santa Maria della Stalletta, dite de Jérusalem, grâce à l'intervention du vice-roi Pedro de Toledo, les Théatins s'installèrent près de San Paolo Maggiore (19 mai 1538). Gaétan dirigea in spiritualibus le monastère de la Sapience fondé par Maria Carafa, sœur de Paul IV. Avec l'aide de deux dames de la noblesse espagnole dont il était le conseiller, il contribua à fonder le monastère des Capucines, près de Santa Maria in Gerusalemme, et le foyer des filles repenties de Santa Maria Maddalena. Fin 1534, Gaétan était correttore de la Compagnie des Bianchi qui assistaient les condamnés. Un groupe de prêtres diocésains, formés selon la spiritualité des clercs réguliers, fut installé près de l'hôpital des incurables pour favoriser le renouveau du clergé napolitain. En collaboration avec Giovanni Marinoni et avec l'aide de quelques nobles, Gaétan fut aux origines du Mont de Piété. Il dénonça le péril des cercles crypto-luthériens.

Saint Gaétan fut élu à plusieurs reprises preposito de Naples ; il fut preposito de la maison de Venise de 1541 à 1543. Il retourna ensuite à la maison de Naples dont il fut élu de nouveau preposito (1547). L'acte par lequel les Théatins s'agrégèrent les Somasques est de sa main. Il mourut à Naples le 7 août 1547, après avoir offert sa vie pour la pacification de la ville qui était déchirée par une lutte fratricide.

Béatifié par Urbain VIII (8 octobre 1629), saint Gaétan de Thiène fut canonisé par Clément X (12 avril 1671) qui ordonna la célébralion de sa mémoire dans l'Église universelle (27 mars 1673).



Prière de Saint Gaétan

Regardez, Seigneur, du fond de votre sanctuaire, du haut des cieux où vous habitez, et voyez cette très-sainte Hostie que le grand Pontife, votre divin Fils, Jésus Notre-Seigneur, vous offre pour les péchés de ces frères. Laissez-vosu toucher par cette offrande, malgré l'excès de notre malice. Voici la voix du Sang de Jésus, notre Frére, qui crie vers vous du haut de la croix. Exaucez-nous, Seigneur ; apaisez votre courroux, considérez notre détresse, et suspendez votre indignation. Ne différez plus, ô mon Dieu, de nous secourir, pour l'amour de vous-même, parce que cette ville sainte et ce peuple sont à vous et qu'ils ont la gloire de porter votre nom. O Dieu, traitez-nous selon votre infinie miséricorde ! Ainsi soit-il.



Biographie de Sainte Julienne du Mont-Cornillon

Henri et de Frescinde, habitants du village de Rétine, près de Liège, moururent en 1197, laissant deux orphelines : Agnès (née en 1191) et Julienne (née en 1192). Les deux fillettes furent placées au couvent des augustines hospitalières du Mont-Cornillon, nouvelle fondation où les religieuses, très fidèles à leur vœu de pauvreté, soignaient des lépreux et des malades. Situé aux portes de Liège, le monastère du Mont-Cornillon comprenait une communauté masculine et une communauté féminine ; la communauté féminine avait une prieure mais le prieur de la communauté masculine lui était supérieur. Sous l'autorité de la sœur Sapience qui les instruisit de la doctrine chrétienne et leur raconta la vie des saints, Agnès et Julienne demeuraient dans une métairie qui dépendait du couvent. Julienne, enthousiasmée par la vie religieuse, encore qu'elle eut un grand attrait pour la solitude, apprit par cœur le psautier et se livra à de si grandes austérités que la sœur Sapience dut la ramener à la modération, lui apprenant, qu'aux yeux du Seigneur, la pratique de l'obéissance vaut mieux que le sacrifice.

Julienne, ayant reçu, à quatorze ans, l'habit des religieuses du Mont-Cornillon (1207), apprit le latin pour mieux s'instruire des vérités de la religion et devint familière des écrits des Pères, singulièrement de saint Augustin et de saint Bernard. Intelligente et instruite, discrète et obéissante, la sœur Julienne, deux ans après sa prise d'habit, reçut, une nuit, la vision du globe de la lune rayonnant de lumière mais traversé en son diamètre par une ligne obscure ; ne comprenant pas cette vision, elle en demanda l'explication à quelques religieuses vertueuses qui lui déconseillèrent d'approfondir ce mystère mais qui ne purent s'empêcher de bavarder, au point que des visiteurs vinrent l'importuner. Sœur Sapience qui était devenue prieure du couvent, sachant la dévotion de Julienne pour l'Eucharistie et son goût pour la solitude, lui fit construire un oratoire où elle put se retirer pour prier. Personne ne lui ayant expliqué sa vision, elle se résolut à prier le Seigneur de lui révéler ce mystère et, pendant son sommeil, en 1210, une voix lui dit : L'Eglise militante est figurée par le globe de la lune ; la tache qui en voile une partie signifie qu'il manque une fête dont Dieu veut l'institution ; c'est la fête du très auguste et très saint sacrement de l'autel. Le Jeudi saint, à la vérité, est désigné cet effet, mais les diverses autres cérémonies de ce jour en empêchent la solennité ; il faut en établir une autre qui sera honorée et observée dans toute la chrétienté. Et cela pour trois raisons : 1. pour que la foi aux mystères de la religion qui diminue et diminuera encore si I'on n'y porte remède soit affermie et confirmée en son entier ; 2. pour que les hommes qui aiment et cherchent la vérité en soient pleinement instruits, et puisent dans cette source de vie des forces pour avancer dans le chemin de la vertu ; 3. pour que les irrévérences et impiétés journalières qui se commettent contre la majesté de ce sacrement soient réparées et expiées par une adoralion profonde et sincère. Désormais, Julienne ne s'occupa plus que de la pensée de Dieu seul qui la favorisa d'une vie mystique extraordinaire, du don de prophétie et de la connaissance des cœurs.

En 1222, lorsque mourut la sœur Sapience, Julienne fut élue prieure du Mont-Cornillon. Elle n'avait pas encore divulgué la révélation qu'elle avait eue et, comme elle demandait au Seigneur de la délivrer de cette mission, elle reçut, au contraire, l'ordre d'agir sans tarder. Ne sachant guère comment s'y prendre, elle décida de révéler sa mission à Eve, une recluse qu'elle avait naguère encouragée et qu'elle voyait une fois par ans, et à Isabelle, une religieuse de Huy. Elles s'adressèrent à Jean de Lausanne, pieux et savant chanoine de l'Eglise Saint-Martin, près de laquelle résidait Eve la recluse ; le chanoine saisit Jacques Pantaléon, archidiacre de Liège, Hugues de Saint-Cher, provincial des Dominicains, Guy de Laon (futur évêque de Cambrai), le chancelier de l'université de Paris et deux dominicains, les pères Jean et Gérard, tous docteurs de l'Université, qui autorisèrent Julienne à faire composer l'office de la Fête-Dieu par Jean, religieux du Mont-Cornillon. Comme le clergé liégeois était divisé sur l'utilité de cette fête, Julienne qui ne voulait rien précipiter, s'en alla en pèlerinage à Cologne, à Tongres et à Maestricht. Un mouvement favorable se produisit à Liège mais le nouveau supérieur du Mont-Cornillon, Roger, souleva les religieuses contre leur prieure qui, avec quatre de ses sœurs et grâce à l'appui de Jean de Lausanne, put se réfugier près de l'église Saint-Martin. Trois mois plus tard, l'évêque de Liège déposait Roger, donnait la charge à Jean (l'auteur de l'office) et Julienne reprenait sa place de prieure.

L'évêque de Liège, Robert de Thourotte, hésitait encore à établir la fête lorsque, sur la route du concile de Lyon, Dieu lui intima sa volonté ; de retour à Liège, il établit la Fête-Dieu dans son diocèse (1246). Après la mort de Robert de Thourotte (16 novembre 1246), sous son successeur, Henri de Gueldre qui rétablit Roger, les persécussions reprirent contre Julienne ; accompagnée de trois fidèles (Agnès, Ozilie et Isabelle de Huy) elle, dut se retirer d'abord à Robermont, au Val-Notre-Dame, puis à Namur, près de l'église Saint-Aubin. Ses compagnes cependant craignaient pour sa santé qui allait en s'affaiblissant. Ne craignez rien, leur disait-elle, je vous tiendrai fidèle compagnie jusqu'à la mort, et même je vous survivrai. En effet, deux d'entre elles (Agnès et Ozilie) moururent peu après, à Namur. Puis Julienne se retira à l'abbaye cistercienne de Salsines.

Cependant, Hugues de Saint-Cher, devenu cardinal de Sainte-Sabine et légat du pape dans le Saint-Empire, approuvait l'établissement de la fête qu'il voulait imposer à tous les diocèses de sa légation. Bientôt Julienne perdit à Salsines la fidèle compagne qui lui restait ; une autre religieuse du Mont-Cornillon, Ermentrude, lui fut envoyée pour l'assister jusqu'à sa mort. La persécution frappa les religieuses de Salsines, JuIienne dut se retirer à Fosses entre Sambre et Meuse, elle y fut attaquée d'une maladie grave, fit mander le chanoine Jean de Lausanne qui ne crut pas devoir venir, et se trouva dans un suprême délaissement qu'elle avait d'ailleurs prédit.

La maladie empira durant le carême. Le jour de Pâques, malgré. son épuisement, elle voulut se rendre à l'église, assista à matines et à laudes, reçut la communion et resta à l'église jusqu'à la fin du jour. Le soir, elle retourna dans sa cellule, demanda l'extrême-onction qu'elle reçut avec des larmes de joie et une présence d'esprit admirable. Le mercredi après l'octave de Pâques elle se trouva plus mal : Himana, l'abbesse de Salsines, accourue à l'annonce du danger, voulut passer la nuit auprès d'elle mais Julienne l'invita à se reposer en l'assurant qu'elle ne mourrait pas ce jour-là. Le jeudi, elle pria Ermentrude de lui réciter son office pour qu'elle pût au moins la suivre d'esprit et de cœur. Le vendredi, Himana vint encore la visiter avec quelques religieuses et toutes jugèrent que c'était la fin. Julienne reçut une dernière fois la sainte communion et s'endormit dans le Seigneur (5 avril 1258).

Trois ans plus tard (29 août 1261), l'ancien archidiacre de Liège, Jacques Pantaléon, depuis évêque de Verdun (1253) puis patriarche de Jérusalem (1255), bien qu'il ne fût pas cardinal, était élu pape ; il publia la bulle Transiturus, le 11 août 1264, à Orvieto : Nous avons jugé à propos de statuer que, outre la mémoire qui se fait tous les jours dans l'Eglise d'un si grand sacrement, l'on en fit encore une annuellement qui fût plus particulière et plus solennelle, assignant pour cela un jour déterminé que nous voulons être le jeudi après l'octave de la Pentecôte.