5ème dimanche de Pâques - Année C

Première lecture

Lecture du livre des Actes des Apôtres (XIV 21-27)[1]

Paul et Barnabé[2], revenus à Iconium[3] et à Antioche de Pisidie[4], affermissaient le courage des disciples ; ils les exhortaient à persévérer dans la foi, en disant : « Il nous faut passer par bien des épreuves pour entrer dans le royaume de Dieu. » Ils désignèrent des anciens pour chacune de leurs Eglises et, après avoir prié et jeûné, ils confièrent au Seigneur ces hommes qui avaient mis leur foi en lui. Ils traversèrent la Pisidie et se rendirent en Pamphylie[5]. Après avoir annoncé la Parole aux gens de Pergé[6], ils descendirent vers Attalia[7], et prirent le bateau jusqu'à Antioche de Syrie[8], d'où ils étaient partis ; c'est là qu'ils avaient été remis à la grâce de Dieu pour l'œuvre qu'ils venaient maintenant d'accomplir. À leur arrivée, ayant réuni les membres de l'Eglise, il leur racontaient tout ce que Dieu avait fait avec eux, et comment il avait ouvert aux nations païennes la porte de la foi.


Textes liturgiques © AELF, Paris


[1] Quand s'achève la première équipée missionnaire, saint Paul qui a pris la prédominance sur saint Barnabé, est désormais nommé à la première place : Paul et Barnabé. Avant de rejoindre leur base missionnaire, Antioche de Syrie, Paul et Barnabé entreprennent de repasser dans les communautés qu'ils ont évangélisées, tant pour jeter les bases d'une première organisation des communautés que pour affermir le courage des Chrétiens car ils savent que les difficultés inhérentes à la foi en ont écarté plus d'un. Sur le modèle de communautés juives, ils choisissent des « anciens » qui auront à veiller ensemble sur le bien de tous. Paul et Barnabé confient ces anciens au Seigneur, ce qui pourrait bien être une ordination. Ensuite, à leur arrivée à Antioche de Syrie, Paul et Barnabé rendent compte de leur travail. Ils reconnaissent n'avoir été que les instruments de Dieu. Ils insistent sur le fait que l'accès des païens à la foi chrétienne est bien la volonté expresse de Dieu. Dans ce court passage des Actes des Apôtres, on reconnaît les idées-forces chères à saint Luc. La foi comporte nécessairement des épreuves, aussi les chrétiens doivent-ils être avertis qu'ils ont à tenir bon. Saint Luc aime à répéter aussi qu'il faut que les communautés s'organisent. Entre la Pentecôte et la venue du Christ en gloire lors de la manifestation plénière du Royaume de Dieu, il y a le temps des communautés chrétiennes qui ont à porter l'Evangile de Jésus à toutes les nations. Enfin saint Luc souligne une fois de plus que le projet de salut de Dieu est destiné à tous les hommes.

[2] Barnabé, juif de la tribu de Lévi, naquit dans l’île de Chypre où une importante colonie juive s’était installée au temps d’Alexandre le Grand. Ayant reçu une culture hellénique, il vint à Jérusalem où il fit partie de la première communauté chrétienne : « Joseph, surnommé par les apôtres Barnabé - ce qui veut dire fils de consolation - lévite originaire de Chypre, possédait un champ ; il le vendit, apporta l’argent et le déposa au pied des apôtres » (Actes des Apôtres, IV 36-37). Tout au long de ses courses apostoliques, il vécut du travail de ses mains (I Corinthiens, IX 6). Certaines traditions disent que Barnabé étudia la torah à l’école de Gamaliel, à Tarse où il rencontra Saul, futur saint Paul, qu’il présenta aux apôtres, à Jérusalem : « Barnabé l’ayant pris avec lui, le mena aux apôtres et leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur qui lui avait parlé et avec quel courage il avait à Damas prêché le nom de Jésus » (Actes des Apôtres, IX 27). Les apôtres envoyèrent Barnabé à Antioche où il fit venir Paul. Ils furent ensuite envoyés ensemble à Chypre puis en Galatie méridionale (Pergé, Antioche de Pisidie, Iconium, Lystres, Derbé) d’où ils revinrent à Antioche. Ils furent encore ensemble au concile de Jérusalem dont, avec Jude-Barsabbas et Silas, ils portèrent les décisions à Antioche. Alors que Paul partait avec Silas pour son second voyage, Barnabé, accompagné de Jean-Marc, retournait à Chypre où, d’après les traditions il mourut martyr.

[3] Iconium (actuelle Konya turque), capitale de la Lycaonie, était intégrée à la province romaine de Galatie.

[4] Antioche de Pisidie : à ne pas confondre avec Antioche de Syrie, Antioche de Pisidie était sous Auguste une colonie de la province de Galatie (Antiochia Cæsaræ). La Pisidie est une province d’Asie Mineure située entre la Phrygie et la Pamphylie

[5] La Pamphylie est, depuis 103 avant Jésus-Christ, une province romaine d’Asie Mineure qui forme une bande longitudinale entre la Lycie, la Pisidie et la Cilicie.

[6] Pergé est une ville de Pamphylie située à douze kilomètres de l’embouchure du Kaystros.

[7] Attalia (actuelle Antalya turque) est un port très fréquenté de Pamphylie d’où l’on pouvait faire voile vers la Syrie et la Phénicie, ce qui évitait de traverser le plateau d’Anatolie.

[8] Antioche de Syrie ou Antioche sur l'Oronte (l’actuelle Antakya de Turquie) qui fut fondée le 22 mai 300 avant Jésus-Christ par Séleucus I°, en l'honneur de son père, Antiochus, devint l’une des plus brillantes cités de l'Orient ; après avoir été une résidence royale des Séleucides, elle fut la capitale de la province romaine de Syrie. Elle était située sur la rive gauche de l'Oronte, à 22 km de la mer, dans la riche plaine qui s’étend au débouché des passes de l'Amanus et alimentée en eau par un lac ; le fleuve et une route la reliaient à son port de Séleucie de Piérie. Sur la voie principale reliant l'Asie mineure à la Syrie-Phénicie et à l'aboutissement du trafic caravanier venant de Mésopotamie, elle tenait une importante position de carrefour commercial, célèbre pour ses textiles et son artisanat des métaux précieux. D’abord peuplée par 10 000 colons gréco-macédoniens, elle attira vite une population indigène pour laquelle on établit un second quartier ; Antiochus III en créa ensuite un troisième, Néapolis, et Antiochus IV un quatrième, Epiphaneia. A l'époque romaine, avec près de 400 000 habitants, elle était, après Rome et Alexandrie, la troisième ville de l’Empire. Après la lapidation de saint Etienne, des chrétiens de Jérusalem se réfugièrent à Antioche où ils entreprirent d’évangéliser les Juifs ; d’autres chrétiens, Chypriotes et Cyrénéens, s'adressèrent aux païens. C'est à Antioche que, pour la première fois, les disciples de Jésus auraient reçu le nom de chrétiens. L'organisation de la nouvelle communauté fut confiée à Barnabé qui, pendant un an, se fit seconder par Paul (Actes des Apôtres, XI 19-26). C'est à partir de l’Eglise d'Antioche que se firent les missions vers Chypre et l’Asie mineure (Actes des Apôtres, XIII 1-3). L'entrée de païens dans l’Eglise posait de nombreux problèmes aux judéo-chrétiens dont certains prétendaient leur imposer au préalable les prescriptions de la loi mosaïque (la circoncision et les règles de pureté alimentaires). Saint Pierre, s'étant rendu à Antioche, avait commencé par partager la table - et par conséquent la commémoration de la cène du Seigneur - avec des paiens convertis, puis s'en était écarté par crainte des judéo-chrétiens. Cet « incident d'Antioche » (Galates, II 11-14) fut à 1'origine du « concile » de Jérusalem (Actes des Apôtres, XV). Saint Paul séjourna plusieurs fois à Antioche, notamment avant ses deuxième et troisième voyages missionnaires (Actes des Apôtres, XV 35 & XVIII 22).