13 novembre

Saint Nicolas 1er, le Grand

Fils du régionnaire Théodore, un très important fonctionnaire de la ville, Nicolas naquit à Rome au début du IX° siècle. Nanti d'une solide culture, Nicolas, pieux, intelligent, vertueux et travailleur, entra dans les ordres et fit toute sa carrière dans la Curie, au patriarcharum du Latran. Sous-diacre de Serge II (844-847), diacre attaché à Léon IV (847-855), il fut un si proche conseiller de Benoît III (855-858) qu’il assura le gouvernement de l'Eglise lorsque l’infortuné pontife, à peine élu et non encore couronné, fut arrêté par les missi de l’empereur Louis II qui lui préférait Anastase (21 septembre 855). Le clergé romain, barricadé dans la basilique des Quatre-Saints-Couronnés, résista et les missi s’inclinèrent. Benoît III ne tint le Saint-Siège que deux ans et demi et mourut le 10 mars 858

Avec l’approbation de l’Empereur, présent à Rome, Nicolas, après à peine quinze jours de vacance du Siège, fut élu, quasi à l'unanimité, à la succession de Benoît III ; présenté par l'empereur Louis II, acclamé par le peuple, soutenu par le clergé vertueux, le pape Nicolas I° fut sacré à Saint-Pierre de Rome le 24 avril 858.

Après Grégoire le Grand (590-604) et avant Grégoire VII (1073-1085), Nicolas I° fut le premier grand pape médiéval, alliant la piété, l'autorité, l'activité, la charité et l'intelligence. Ayant su s'entourer de personnages efficaces et cultivés, il s'appuya fermement sur tout ce que l'Eglise connaissait de textes législatifs et administratifs. Il sut aussi s’attacher les ennemis de ses prédécesseurs et choisit des conseillers dans l’entourage de Louis II, au point qu’Anastase le Bibliothécaire que Benoît III avait fait abbé de Sainte-Marie-du-Trantévère, devint un des plus brillants rédacteurs de la chancellerie pontificale et le biographe de Nicolas I°. Profitant du mouvement de l'époque, il se mit au-dessus des empereurs en leur refusant d'intervenir dans les affaires de l'Eglise et se posa comme dernier recours pour toutes les affaires. Son autorité fut telle qu’il put s’imposer aux monarques carolingiens : Charles le Chauve recourut à lui lorsque son frère, Louis le Germanique, malgré la foi jurée, envahit la France (858), et, quatre ans plus tard, lorsque ses deux fils, Charles et Louis, se révoltèrent contre lui en Aquitaine ; quand le roi de Lotharingie, Lothaire II, avec l’appui de ses évêques, voulut divorcer, Nicolas fulmina l’excommunication et le roi eut beau l’assiéger au Vatican, le pape l’emporta. Nicolas le Grand affirmait sa primauté pontificale sur toutes les églises d’Occident dont il était le patriarche : il intervint pour défendre ou pour soumettre les archevêques métropolitains en Bretagne, en Touraine, en Champagne, à Ravenne, à Vienne ... Gêné par l'insubordination de quelques grands évêques, en particulier par Hincmar de Reims, alors le plus puissant évêque d'Occident, et par le patriarche Jean de Ravenne, le Pape les fait plier. Si quelqu’un brave les dogmes, les ordres, les interdictions, les sanctions ou les décrets promulgués sainement par le chef du siège apostolique, lit-on dans l’ultime canon du concile romain qu’il avait rassemblé en 863, qu’il s’agisse de la foi catholique, de la discipline ecclésiastique, de la réprimande des fidèles, du châtiment des scélérats, des interdictions concernant les maux imminents ou futurs, qu’il soit anathème.

Le peuple romain l’aima en raison de ses grandes charités, au point de professer qu’il n’y eut dans toute la ville un seul pauvre qui ne vécût des bienfaits du saint pontife. Il venait juste de monter sur le trône de Pierre, lorsque, le 30 octobre 860, le Tibre déborda, le Pape organisa les secours aux sinistrés qu’il accueillit dans l’hospice de Sainte-Marie. Durant tout son pontificat, il fut attentif aux aveugles et aux infirmes. Il entreprit efficacement la défense de la ville contre les Sarrasins et, à cet effet, construisit la place forte d’Ostie où il entretint une garnison considérable. Il condamnait toute guerre qui ne fût pas proprement défensive et proscrivit comme un crime la torture des voleurs et des brigands.

En Orient où Nicolas I° entendait aussi s’imposer, son règne entier fut empoisonné par le patriarche Photius de Constantinople. Au printemps 860, on apprit la démission et le remplacement du patriarche Ignace de Constantinople dont le pape était officiellement averti par la profession de foi orthodoxe envoyée par son successeur. Le fait était si surprenant que le Pape, profitant de ce que l’Empereur demandait qu’il lui envoyât deux représentants au concile qui devait régler une fois pour toutes l’affaire des images, députa deux légats (Radoald, évêque de Porto, et Zacharie, évêque d’Anagni) avec mission d’enquêter sur place à propos de la démission d’Ignace (septembre 860). Les deux légats furent achetés par l'empereur Michel qui, en fait, avait déposé le Patriarche et l’avait fait enfermer sur l’île de Thérébinthe (été 858) pour le remplacer par Photius, savant laïc à sa solde et président de la chancellerie impériale, qui, en six jours avait reçu tous les ordres et fut sacré à Noël par l’évêque Grégoire Asbestas, évêque de Syracuse, qu’Ignace avait anathémisé et déposé ; malgré ses promesses formelles, Photius avait réuni un synode pour déposer Ignace (859). Le synode réuni le 6 avril 861, avec l’accord des légats, déposa Ignace et reconnut Photius ; Nicolas I° désavouant ses légats fit savoir à l’Empereur et au prétendu patriarche, en rappelant la primauté romaine, qu’il considérait toujours Ignace comme patriarche de Constantinople. Ignace envoya au Pape un Libellus (fin 862) et le synode romain d’avril 863 déclara l’irrégularité de l’élection et de l’ordination de Photius qu’il priva de toute dignité ecclésiastique. Il s'ensuivit d’interminables négociations, ourlées de correspondances violentes, tandis que Rome était opposée à Constantinople à propos de la juridiction sur la Bulgarie dont le roi Boris venait de recevoir le baptême (864). Le Pape ne voulut céder sur rien mais proposa de faire entendre Ignace et Photius devant un synode romain (28 septembre 865). Cependant, à propos de la Bulgarie, le pseudo-patriarche Photius ameutait par une encyclique les églises d'Orient contre l'Eglise d'Occident et ses pratiques, fournissant ainsi tout ce qui fera désormais l’arsenal critique orthodoxe contre les catholiques romains : jeûne du samedi, permission des laitages dans la semaine qui précède le carême, célibat des prêtres, réitération de la confirmation conférée par de simples prêtres et surtout le Filioque.  Au mois d’août 867, il réunit à Constantinople un concile prétendument œcuménique qui, en septembre, excommunia et déposa Nicolas I°, lequel ne le sut jamais, puisqu’il mourut le 13 novembre 867, non sans avoir rallié contre Photius les théologiens latins. L'Empereur Michel avait été assassiné par Basile (24 septembre 867) qui força Photius à la démission, rappela Ignace (23 novembre 867) et renoua avec Rome alors sous le pontificat d’Hadrien II.

Nicolas I°, malade depuis plusieurs années, mourut à Rome, après neuf ans et sept mois de pontificat,  le 13 novembre 867 et fut enterré à Saint-Pierre du Vatican. Son principal collaborateur Anastase resta à la bibliothèque du Vatican d'où il ne manqua pas de conserver tout ce qui avait trait au Pape de sa jeunesse.

La ferveur populaire le plaça au nombre des saints mais il faut attendre la fin du Moyen-Age pour que l'Eglise le fasse officiellement en l'associant à la fête de Saint Nicolas (6 décembre). Il fut fêté à partir de 1850 au 5 novembre et, à partir de 1883, au 13 novembre.