31 octobre

Saint Quentin

Sa vie


Notre Dame des tables

Histoire



Saint Quentin

Quentin, dit-on, naquit à Rome d’un père idolâtre, Zénon, qui était sénateur de l’Empire. Converti au christianisme, Quentin aurait été baptisé par le pape Marcellin qui l’aurait envoyé prêcher dans les Gaules en compagnie de Lucius, Crépin, Crépinien, Rufin, Valère, Marcel, Eugène, Victoric, Fuscien, Rieul et Piat. Arrivés à Amiens, les douze missionnaires se seraient partagé, par la voie du sort, les pays qu’ils devaient évangéliser : Quentin resta à Samarobriva (Amiens) et Lucius partit pour Beauvais.

Menant une vie de pénitence, la mission de Quentin, ourlée de nombreux miracles opérés par un simple signe de crois, fut si fructueuse que Rictiovare, représentant dans les Gaules de Maximien Hercule que Dioclétien avait associé à l’Empire, en fut averti, alors qu’il était à Bâle. Rictiovare avait tant immolé de chrétiens à Trèves, sa résidence habituelle, que les flots de la Moselle s’étaient rougis de sang. Accouru à Amiens, Rictiovare fit arrêter Quentin qui, enchaîné, fut enfermé dans une maison de la ville. Le lendemain, Quentin comparut devant Rictiovare :

- Quel est ton nom ?

- Je porte le nom de chrétien parce que, en effet, je le suis, croyant de cœur en Jésus-Christ et le confessant de bouche. Toutefois mon nom propre est Quentin.

- Et quelle est ta famille, ta condition ?

- Je suis citoyen romain et fils du sénateur Zénon.

- Comment se fait-il donc que, étant d’une si haute noblesse et fils d’un père si distingué, tu te sois livré à une religion si superstitieuse et que tu adores un malheureux que des hommes ont crucifié ?

- C’est que la souveraine noblesse est d’adorer le Créateur du ciel et de la terre, et d’obéir de tout cœur à ses divins commandements.

- O Quentin, laisse-là cette folie qui t’aveugle et viens sacrifier aux dieux !

- Non, jamais je ne sacrifierai à vos dieux qui, en vérité, ne sont que des démons. Cette folie dont tu me dis aveuglé, ce n’est pas une folie, mais, au contraire, et je ne crains pas de le proclamer hautement, c’est une souveraine sagesse. Car quoi de plus sage que de reconnaître le Dieu unique et seul véritable, et de rejeter avec dédain des simulacres muets, faux et mensongers ? Oui, et ceux-là, assurément, sont des insensés qui leur sacrifient pour t’obéir.

- Si tu n’approches à l’instant et ne sacrifies à nos dieux, j’en jure par ces mêmes dieux et par les déesses, je te ferai torturer de toutes manières jusqu’à ce que tu en meures.

- Non, non, seigneur président, sache-le bien, ce que tu m’ordonnes je ne le ferai jamais, et tes menaces, je ne les crains nullement. Fais au plus tôt ce qui te plaira. Tout ce que Dieu te permettra de m’infliger, je suis prêt à le subir. Oui, par la permission de mon Dieu, tu peux soumettre ce corps à diverses tortures et à la mort même, mais mon âme demeure au pouvoir de Dieu seul, de qui je l’ai reçue.

Rictiovare ordonne à quatre soldats d’étendre Quentin sur un chevalet et de l’y déchirer à coups de fouets. Quentin, pendant cette effroyable torture dit : Seigneur, mon Dieu, je vous rends grâces de ce qu’il m’est donné de souffrir pour le saint nom de votre Fils, Jésus-Christ, mon Sauveur. En ce moment donc, ô mon Dieu, donnez-moi la force et le courage dont j’ai besoin. Tendez-moi une main secourable, afin que je puisse demeurer supérieur à tous les traits de mes ennemis et triompher de leur cruel préfet Rictiovare ; et cela pour l’honneur et la gloire de votre nom lequel est à jamais béni dans les siècles des siècles. Du ciel, une voix lui répond : Courage et constance, Quentin ! Je suis moi-même avec toi. Les bourreaux sont renversés et, sans pouvoir se relever, souffrent d’atroces douleurs au point de crier au préfet : Seigneur Rictiovare, prends pitié de nous ; nous sommes en proie à de cruelles souffrances ; des feux secrets nous dévorent ; impossible de nous tenir debout ; à peine pouvons-nous parler.

Au comble de la fureur, Rictiovare commande : J’en jure par les dieux et par les déesses, puisque de Quentin est un magicien et que ses maléfices ont ici le dessus, qu’on le jette à l’instant loin de ma présence et qu’on l’enferme dans le plus noir cachot où il ne puisse absolument ni voir le jour ni recevoir la visite d’aucun chrétien.

La nuit suivante, alors que Quentin est dans le noir cachot, un ange lui apparaît et lui dit : Quentin, serviteur de Dieu, lève-toi et vas sans crainte au milieu de la ville ; console et fortifie ses habitants dans la foi en Notre-Seigneur Jésus-Christ, afin qu’ils croient en lui et qu’ils se purifient par le saint baptême : car voici bientôt pour eux le jour de la délivrance ; les ennemis du nom de chrétien seront prochainement confondus, ainsi que leur préfet, l’impie Rictiovare. Les gardiens étant frappé d’un profond sommeil, l’ange le conduit hors de la prison, jusque sur la place de la ville où Quentin prêche et convertit six cents personnes. Les gardes, réveillés, rejoignent la place et s’y convertissent aussi puis, revenant chez Rictiovare pour témoigner de leur foi.

Rictiovare fait reprendre Quentin mais, comme malgré d’horribles tortures, il n’arrive ni à le faire abjurer, ni à le faire mourir, il décide de l’envoyer à Rome. Parvenus à Augusta Veromanduorum (aujourd’hui Saint-Quentin), les soldats reçoivent l’ordre d’y attendre Rictiovare qui, le lendemain, 31 octobre 303, fait reprendre les tortures au bout desquelles, de guerre lasse, il ordonne qu’on décapite Quentin. Alors que la tête de Quentin tombe, on entend une voix crier : Quentin, mon serviteur, viens et reçois la couronne que je t’ai préparée. Voici les chœurs des anges qui viennent te faire cortège pour te conduire triomphant dans la Jérusalem céleste.



Notre-Dame des Tables

Le 7 décembre 1789, un terrible orage s’abattit sur Montpellier et la foudre éclatant sur l'église de Notre-Dame des Tables, les habitants de Montpelliérains y virent un lugubre présage : la foudre, tombant sur le clocher, traversa la nef, se dirigea vers l'autel de la Sainte Vierge et commença, par la mutilation de la main, l'attentat inconscient que la Révolution se chargea bientôt de consommer, en renversant l’église dont les derniers vestiges disparurent en 1806.

L’église qui devint Notre-Dame des Tables, fut, dit-on, construite à la fin du quatrième siècle, entre les hameaux de Montpellier et de Montpelliéret, sous le titre de Sainte-Marie. En 1090, Guillem V, seigneur de Montpellier, donna à l’évêque de Maguelone cette église où, en 1143, Guillem VI de Montpellier rapporta de Terre Sainte, une miraculeuse statue de la Vierge en bois noir, haute de quatre-vingt-trois centimètres, qui attira aussitôt un grand concours de pèlerins. Pour la distinguer de Notre-Dame du Château qui avait été consacrée en 1156, on appela cette église Notre-Dame des Tables parce que les changeurs avaient leurs tables tout près d’elle. La renommée de cette Vierge noire fut si grande que, vers 1215, l’évêque de Maguelone, Jean de Montaut, établit la fête des Miracles de Notre-Dame des Tables. Au siècle suivant, Jean Raynaut qui était orfèvre à Montpellier, après avoir été guéri miraculeusement devant la statue de Notre-Dame des Tables, offrit au sanctuaire une statue en argent de la Vierge, dite Vierge de l’Orfèvre, tandis que la Vierge noire, visitée par neuf papes et par tous les rois qui passèrent par Montpellier, était appelée la Majesté antique.

Tout au long du Moyen-Age, les Montpelliérains recoururent à Notre-Dame des Tables qui les protégea si bien contre la peste, la guerre et la sécheresse qu’au commencement du treizième siècle, à l’autre bout de l’Europe, Césaire, moine du couvent d’Heisterbach, près de Bonn, rapportait : Quand les médecins de notre ville sont impuissants à guérir les malades, ils leur disent : « Allez à Montpellier et vous serez guéris. La naissance du roi Jacques I° d’Aragon et celle de saint Roch furent attribuées à une intervention miraculeuse de Notre-Dame des Tables. Les consuls de Montpellier venaient, chaque 24 juin, avant d’entrer en charge, prêter serment devant Notre-Dame des Tables où tout cathare converti faisait son pèlerinage de repentir. Pierre de Bénévent, cardinal-prêtre au titre de Saint-Etienne in monte Cælio, légat pour toute la France dans le but d’extirper l’hérésie albigeoise, ouvrit, à Notre-Dame des Tables, le 8 janvier 1215, le concile de Montpellier où siégèrent cinq archevêques, vingt-huit évêques et de nombreux barons qui attribuèrent à Simon de Montfort les terres conquises du comté de Toulouse ; en plus de frapper d’excommunication les perturbateurs de paix, de réglementer la dénonciation des hérétiques et d’interdire de nouveaux impôts, le concile de Montpellier rappela aux clercs, sous peine de suspense, l’obligation de l’habit ecclésiastique, l’interdiction de la chasse, de l’usure, de la fréquentation des maisons et sociétés de femmes.

Notre-Dame des Tables souffrit moins que les autres églises de la ville de la fureur des protestants qui se contentèrent de faire crouler sa voûte et de briser les autels ; rendue aux catholiques deux ans après l’édit de Nantes, l’église, dès 1608, avait repris son visage d’antan mais, dans la nuit du 16 au 17 décembre 1621, les protestants de nouveaux révoltés, la détruisirent complètement, sauf la tour de l’horloge. Lorsque Louis XIII ayant repris la ville voulut faire chanter un Te Deum, toutes les églises étant ruinées, il dut faire construire une salle provisoire près de Notre-Dame des Tables. La reconstruction fut décidée en 1664 et les Montpelliérains quelle que fut leur condition, participèrent physiquement à l’œuvre que Charles de Pradel consacra en 1684.

La statue de Notre-Dame des Tables disparut mais la dévotion fut transportée dans la chapelle des Jésuites qui était devenue l’église paroissiale, la fête de Notre-Dame des Miracles fut rétablie en 1858 et fixée au 31 octobre ; le 20 mars 1889, Mgr. de Cabrières, entouré des évêques de Carcassonne, de Viviers et du Puy, assisté par l'archevêque d'Avignon, couronnait, au nom de Léon XIII la statue dont Mgr. d’Hulst rappelait la gloire et les bienfaits.